Les directeurs de neuf quotidiens, lors d'une réunion tenue hier à Alger, ont décidé l'organisation d'une journée sans presse le 22 septembre prochain. Face à cette cabale sans précédent dont fait l'objet la presse indépendante, les éditeurs ont décidé de passer à l'action. En effet, la réunion qui a regroupé, hier, à la Maison de la presse, les directeurs de 9 journaux (Le Matin, El Khabar, El Watan, Liberté, Le Soir d'Algérie, L'Expression, El-Fadjr, Akher Saâ et Er-Raï), est sanctionnée par une déclaration où ils ont fait part de leur décision d'“entamer une série d'initiatives de riposte et de sensibilisation de l'opinion nationale et internationale”. Une décision motivée par “la persistance de ces agressions contre la presse nationale et la liberté d'expression en Algérie”. Comme actions prévues : une journée sans presse pour le lundi 22 septembre, un forum pour les libertés regroupant les forces sociales et politiques prochainement, des déplacements de délégations auprès d'organisations internationales pour “les alerter sur la gravité des atteintes aux libertés en Algérie”. Dans cette déclaration, les éditeurs constatent amèrement que “le harcèlement contre la presse continue” et que “la police nationale est ainsi saisie d'une mission de harcèlement des journalistes qui, objectivement, n'est pas la sienne”. En effet, alors que l'étau n'est pas tout à fait desserré sur Ali Dilem et Mohamed Benchicou, voilà qu'à son tour, le directeur du Soir d'Algérie, Fouad Boughanem est mis dans la ligne de mire du pouvoir actuel. Hier encore, il a reçu une troisième convocation de la police judiciaire pour se présenter au bureau des atteintes aux personnes du commissariat central. La première convocation lui a été envoyée, mercredi, pour être suivie d'une deuxième, vendredi, au moment même où se tenait, à la Maison de la presse Tahar-Djaout, le rassemblement du Conseil national pour la sauvegarde des libertés (CNSL) dénonçant les attaques que subies la presse. Le motif de cette cascade de convocations ? Répondre d'articles parus dans son journal et qui, apparemment, ne semblent pas plaire. Ainsi donc, les mésaventures de la presse indépendante ne veulent pas tirer à leur fin. L'équipe au pouvoir semble plus que jamais décidée à lui rabattre le caquet, à ses yeux, coupable, comme jamais, de s'être donnée trop de libéralités dans sa critique de la gestion des hommes forts du pouvoir de Bouteflika. Aussi, à chaque fois que l'on s'attendait à une baisse de la pression, c'est le contraire qui se produit en voyant la campagne de harcèlement reprendre de plus bel. Pour rappel, le journal Liberté a reçu une quinzaine de convocations de la police judiciaire. Lundi 8 septembre, notre caricaturiste Ali Dilem et le directeur de publication du Matin, Mohamed Benchicou, sont embarqués de force par la police au commissariat central pour être auditionnés le lendemain par le procureur de la république et le juge d'instruction. Le jour même, pas moins de six personnes, deux journalistes, trois photographes, un responsable politique et une citoyenne, étaient arrêtées pour être ensuite relâchées. Le directeur du journal Er-Raï était, hier encore, sous les verrous. C'est dire toute la hargne des auteurs de cette déclaration de guerre lancée contre la presse un certain 18 août 2003 avec la suspension “commerciale” des six journaux. Arab Chih Affaire Benaoum Ahmed Le DG d'Er-Raï toujours auditionné Auditionné pour la seconde fois en moins de 48 heures par le juge d'instruction près le tribunal d'Es-Sedikia pour des chefs d'inculpation de détournement de biens immobiliers, Benaoum Ahmed n'a pu animer la conférence de presse qu'il devait tenir au niveau du siège de son journal à Sidi El-Houari. Les deux affaires en question, celle de la Sacop et de l'OPGI, ont surgi au cours du mois de mai à Oran, à la suite d'une guerre médiatique larvée entre Er-Raï et d'autres quotidiens qui a fait rage. Jusqu'à 19h, hier, personne n'était en mesure de savoir si le patron d'Er-Raï et du Journal de l'Ouest allait être relâché. “Notre directeur général comparaît depuis ce matin (dimanche, ndlr) devant le juge d'instruction, entouré de ses avocats”, laisse-t-on entendre auprès de ses proches collaborateurs. Benaoum Ahmed, propriétaire des quotidiens Er-Raï et Le Journal de l'Ouest et de l'hebdomadaire Détective, est en garde à vue, depuis jeudi, date à laquelle il a été interpellé par les services de police pour une série de plaintes déposées par les services de l'hydraulique, de l'agriculture et de l'OPGI. B. Ghrissi