Décidément, les propriétaires de constructions inachevées ou illicites semblent ne plus vouloir régulariser leur situation. Au moment où l'Etat lance des programmes ambitieux de logements neufs, d'innombrables habitations restent, des décennies durant, encore au stade de travaux en chantier. La grande majorité de ces citoyens ne s'inquiètent pas outre mesure des sanctions qu'ils encourent s'ils ne se conforment pas aux dispositions de la loi 08-15 fixant les règles de mise en conformité des constructions et leur achèvement. Deux ans et demi après la promulgation de ce texte, l'opération n'a pas suscité l'adhésion des personnes concernées. Le nombre d'habitants qui ont déposé leurs dossiers au sein des communes reste encore insignifiant. À Alger, pour ne citer que cette wilaya, les 57 APC n'ont reçu que 6 556 demandes de régularisation entre le mois de novembre 2009 et le mois de septembre 2010. De ce total, 3 378 dossiers ont été transmis à la commission de daïra qui décidera pour un avis favorable ou défavorable. En cas de refus, l'intéressé peut envoyer un recours au wali d'Alger. Les permis de construire et d'achèvement sont les actes d'urbanisme les plus sollicités. Draria est la daïra qui a enregistré le plus grand nombre de dépôts avec 1 431 demandes. Elle est suivie de Bir-Mourad-Raïs avec 1 305 dossiers et d'El-Harrach avec 818. Si ces quelques acquéreurs ont affiché leur volonté d'assainir leur situation, les institutions publiques concernées par cette réglementation n'ont pas jugé utile de s'y conformer. C'est le cas de plusieurs écoles, CEM, lycées, hôpitaux, mosquées, Opgi, Eplf… qui, pourtant, devraient donner l'exemple dans cette action d'envergure. “Parmi les principales constations recensées, il semblerait que les collectivités n'ont pas pris les initiatives nécessaires pour en informer les usagers, les sensibiliser et les initier à des portes ouvertes pour débattre les problèmes posés en la matière”, souligne le Collège national des experts architectes (Cnea). Les rencontres de sensibilisation et les débats offrent l'occasion aux responsables concernés d'“expliquer les articles de cette loi aux usagers et à l'administration, et surtout de les faire appliquer scrupuleusement”, indique le Cnea. Par ce bilan, il apparaît qu'un travail de vulgarisation et de sensibilisation supplémentaire doit être accompli. Cette tâche échoit en toute évidence aux collectivités locales. “La loi doit être appliquée rigoureusement, faute de quoi nous ne sortirons jamais des situations enregistrées à ce jour en matière de construction”, estime le président du Cnea, M. Abdelhamid Boudaoud. Le P/APC, étant le premier magistrat de la commune, doit intervenir, selon lui, de manière énergique et immédiate à l'ouverture du chantier, en responsabilisant les géomètres experts, les architectes, les ingénieurs et les urbanistes. Une commission de suivi et de contrôle des travaux doit être également confiée au maître d'œuvre pour veiller au respect des normes des construction. Et face à l'aléa sismique, suggère M. Boudaoud, les ingénieurs devront être impérativement associés pour délivrer le certificat de conformité technique. “Il ne suffit plus d'achever des constructions déjà entamées, mais de tenir compte du risque sismique qui se pose sérieusement pour le nord du pays”, précise-t-il. Les services compétents au sein des APC doivent procéder aussi au recensement du parc immobilier inachevé. Les communes auront ainsi leur fichier local qui les renseignera sur l'âge, la vétusté du parc immobilier et le potentiel foncier.