La visite du ministre japonais des Affaires étrangères en Algérie est une première depuis l'établissement des relations diplomatiques en 1962. Durant son séjour qu'il entame dès aujourd'hui, le MAE, M. Seiji Maehara, rencontrera son homologue Mourad Medelci. Une audience avec le président Bouteflika ou avec le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, est également prévue. Liberté : Votre visite, qui constitue la première visite de haut niveau d'un responsable japonais en Algérie, signifie-t-elle une volonté de Tokyo de relancer les relations bilatérales avec Alger ? Seiji Maehara : Je suis très heureux de rendre visite à l'Algérie. En fait, c'est la première visite officielle du ministre des Affaires étrangères du Japon en Algérie. L'Algérie mène, depuis son indépendance en 1962, une diplomatie très active pour la paix et le développement du Moyen-Orient et de l'Afrique et prend le leadership dans l'engagement pour relever les défis sur des questions mondiales communes de l'humanité. Le Japon s'engageant, lui aussi, activement dans les mêmes domaines, je considère qu'il est important que les relations d'amitié et de coopération entre nos deux pays se développent. Le Japon s'intéresse au fait que l'Algérie possède des ressources énergétiques importantes et un grand marché intérieur et il souhaite renforcer les relations avec l'Algérie et contribuer à son développement. Quand nous observons l'augmentation mondiale de la demande des infrastructures, le Japon souhaite que la haute technologie japonaise, avec une conscience environnementale, soit appliquée dans l'aménagement d'infrastructures non seulement en Asie mais aussi dans d'autres régions et particulièrement en Algérie, et ce, aussi par le moyen de la formation des ressources humaines et de l'encouragement des études scientifiques. Ainsi, le Japon souhaite contribuer au développement économique de l'Algérie. En somme, je souhaite que les deux pays coopèrent et se développent ensemble. L'année 2012 est une année commémorative parce qu'elle est le cinquantième anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre le Japon et l'Algérie. À la veille de cet anniversaire, le Japon souhaite développer nos relations amicales et approfondir notre coopération dans tous les domaines, y compris la politique et l'économie. Le Japon est impliqué dans plusieurs projets structurants en Algérie dont une partie de l'autoroute Est-Ouest qui accuse un retard dans sa réalisation ainsi que dans le secteur de l'énergie. Le Japon compte-t-il investir davantage en Algérie à la lumière des projets inscrits dans le plan quinquennal 2010-2014 avec une enveloppe de plus de 200 milliards de dollars ? Les relations économiques entre les deux pays ont une longue histoire et aussi durant ces dernières années, des entreprises japonaises reçoivent des commandes de projets d'importance majeure en Algérie. Par exemple, la société JGC est engagée dans l'installation de traitement de gaz naturel. Nous sommes informés qu'il y aura des investissements effectués dans le cadre du plan quinquennal rendu public au mois de mai de cette année pour l'aménagement des infrastructures en Algérie telles que les réseaux ferroviaires à grande vitesse, les équipements de dessalement de l'eau de mer et l'amélioration de réseaux de communication. Il y a des entreprises japonaises qui s'intéressent au plan quinquennal. Nous ne sommes pas au courant des projets concrets auxquels elles vont participer, mais je serai ravi si les technologies japonaises de pointe peuvent jouer un rôle positif dans l'aménagement des infrastructures de grande envergure en Algérie. J'éprouve la nécessité d'échanges plus étroits d'opinions et d'informations dans les secteurs public et privé entre le Japon et l'Algérie. L'Algérie a aujourd'hui besoin de beaucoup plus de transfert de technologie que de financement. Le Japon compte-t-il faire un effort dans ce sens surtout lorsqu'on connaît les lois régissant la propriété intellectuelle au pays du Soleil levant ? L'Algérie déploie de grands efforts pour la promotion de l'investissement direct étranger pour diversifier son industrie nationale et réduire sa dépendance vis-à-vis du secteur des hydrocarbures. Les entreprises japonaises, de leur côté, sont intéressées par les ressources énergétiques très riches, à la capacité financière et au grand marché intérieur de l'Algérie. Par ailleurs, il est vrai que les hommes d'affaires japonais sont quelque peu embarrassés de la complexité du système réglementaire algérien relatif aux capitaux étrangers. Afin d'améliorer l'environnement d'investissement en Algérie, il faut approfondir la compréhension mutuelle tant entre les deux gouvernements qu'entre les sociétés privées des deux pays. Nous souhaitons que les relations mutuellement bénéficiaires s'établissent entre les deux pays, avec l'amélioration de l'environnement d'investissement en Algérie à travers les négociations de l'accord sur l'investissement, qui vont désormais avancer. Ces dernières années, les coopérations technologiques entre les deux pays ont été réalisées pour la formation des ressources humaines, entre autres dans les domaines du génie électronique et de l'observation environnementale, dans le cadre de l'aide publique au développement du Japon. Nous prévoyons dans l'avenir des recherches conjointes et la coopération pour la formation des ressources humaines avec l'Algérie afin de transférer les technologies japonaises dans le domaine de l'énergie solaire. Dans les années 1970 et 1980, les rela tions économiques étaient prospères grâce aux activités liées à l'exploitation du pétrole et du gaz naturel. Aujourd'hui, les relations ont pris une autre dimension sans parvenir à des relations exceptionnelles. Que compte faire le Japon pour consolider les relations économiques et politiques ? Le Japon a traditionnellement de bonnes relations, notamment dans le domaine énergétique, avec l'Algérie, qui est l'une des plus grandes puissances économiques africaines et en même temps qui joue un rôle important pour la paix et le développement du Moyen-Orient et de l'Afrique et dans les questions internationales telles que la réforme du Conseil de sécurité de l'ONU et la lutte contre le changement climatique, etc. Le Japon espère davantage renforcer la coopération dans tous les domaines, y compris la politique, l'économie et la culture, avec l'Algérie. Je souhaite approfondir et renforcer les relations bilatérales à travers des échanges de différents niveaux y compris du haut niveau du gouvernement ainsi que des consultations politiques. Le japon veut investir dans l'équipement, l'infrastructure, les PME, l'agriculture, le tourisme. Peut-on en connaître les détails ? Je me réjouis du fait que des entreprises japonaises ont été très actives sur le marché algérien dans le domaine de l'installation industrielle. Les investissements ont été effectués principalement dans le secteur énergétique, mais il est souhaitable désormais de les dynamiser également dans d'autres domaines. L'Algérie possède des ressources énergétiques riches et un grand marché intérieur et affiche son plan quinquennal visant à un aménagement d'envergure des infrastructures, ainsi qu'à davantage de développement économique du pays. Les entreprises japonaises s'y intéressent et le gouvernement japonais a l'intention de soutenir le renforcement des relations économiques entre les deux pays. Dans le cadre du dialogue politique, l'Algérie et le japon partagent des positions diplomatiques similaires. Peut-on connaître votre commentaire sur le processus de décolonisation au Sahara occidental et le processus de paix au Proche-Orient ? Le Japon considère que tous les conflits internationaux doivent être promptement réglés. Concernant le problème du Sahara occidental, le Japon souhaite qu'il soit réglé d'une manière prompte et pacifique à travers des négociations dans le cadre de l'ONU et espère que les négociations directes s'ouvrent prochainement. En ce qui concerne le processus de paix au Moyen-Orient, le Japon soutient la solution à deux Etats selon laquelle Israël et l'Etat palestinien économiquement indépendants, coexistent en paix et en sécurité. En se basant sur cette position, le Japon a effectué des aides aux Palestiniens supérieures à 1,1 milliard de dollars depuis 1993. Le Japon discutera ce genre de questions internationales avec l'Algérie dans le cadre des consultations politiques. La culture n'est pas en reste dans la coopération algéro-nippone, le Japon envisage-t-il une implication plus profonde à savoir la création d'un centre culturel japonais à Alger ? Nous n'avons actuellement pas de projet de l'installation du centre culturel japonais à Alger. Mais nous souhaitons promouvoir davantage des échanges des personnes entre les deux pays, comme le montre la conclusion de l'accord des échanges entre l'université de Tsukuba et l'université des sciences et de technologie Houari-Boumediene du mois de mars de cette année, ainsi que l'organisation de la conférence académique algéro-japonaise du mois dernier. Par ailleurs, à la veille du cinquantième anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques avec l'Algérie en 2012, nous souhaitons renforcer la coopération et les échanges dans les domaines de la culture et de l'information.