Le leader du Rassemblement a longuement plaidé pour la restauration de l'Etat, “fragilisé comme jamais par le président Bouteflika”. “Il faut disqualifier la candidature de Bouteflika pour un second mandat”, a martelé Saïd Sadi, le président du RCD, jeudi dernier, dans une conférence de presse animée à la Maison du peuple UGTA. Cette déclaration, faite à l'issue de la convention régionale du RCD des wilayas du Centre (Alger, Chlef, Tipasa, Médéa, Aïn Defla et Blida) et à laquelle ont pris part quelque 600 cadres du Rassemblement, s'appuie sur la gestion désastreuse du président Bouteflika des affaires du pays. “La situation que vit le pays est pire que celle que nous avons connue en 1991”, a expliqué Dr Sadi pour lequel, “à l'époque, il y avait une relative stabilité institutionnelle et le crédit de l'Etat n'était pas à ce point entamé. La société avait pu mobiliser des ressources que treize ans de terrorisme et quatre ans de gabegie ont considérablement réduits”. Le pire dans la situation actuelle réside, selon l'orateur, dans le fait que la crise est au sein même des institutions. Aussi, “l'approche de l'élection présidentielle transforme la manipulation traditionnelle des institutions en stratégie de détournement qui impose à la nation une situation de coup d'Etat à blanc : justice, communication, finances, intérieur et maintenant la diplomatie, sont asservis par un clan et enrôlés dans une confiscation de l'Etat”, expliquera-t-il, à l'ouverture de la convention régionale, tout en précisant que, pour l'instant, “seule l'institution militaire semble échapper au césarisme et au népotisme présidentiels”. “Je refuse, dira-t-il, à Bouteflika le droit d'assimiler le candidat, d'asservir aux ambitions du candidat la fonction présidentielle.” Tout comme il dénonce le “racket de l'Etat pour imposer une candidature, en distribuant des centaines de millions de dinars sans un quelconque contrôle”. L'implication du ministre des Affaires étrangères, Abdelaziz Belkhadem, dans un mouvement putschiste contre l'actuelle direction du FLN a également été soulevée par le n°1 du RCD : “C'est une catastrophe que représente pour l'Algérie le fait d'enrôler un ministre des Affaires étrangères dans une voyoucratie politique et dans une opération de subversion.” Et d'enchaîner : “Le ministre des Affaires étrangères représente tous les Algériens à l'étranger, c'est une véritable humiliation qu'il inflige de la sorte à tout le pays.” Le leader du RCD recommande, à cet égard, à ce que soient dénoncés les abus du président de la République : “C'est la destinée nationale qui est en train de se jouer. Si on se tait et on le laisse faire, celui qui va passer demain (Président) ne va-t-il pas voler ou dégommer quelqu'un parce qu'il n'est pas de son parti ?”. Toutefois, l'intervenant précisera qu'il ne “conteste pas à Bouteflika le droit de présenter sa candidature”, mais qu'il faut “l'empêcher de gagner un second mandat car, il représente un sérieux danger pour la nation”. Quelle est l'alternative à Bouteflika ? Le président du RCD a laissé entendre que l'alternative à l'actuel Président-candidat ne doit plus émerger de l'intérieur du système, mais devrait plutôt jaillir de l'opposition démocratique. “Notre rôle n'est pas de restaurer tout ou une partie du régime, mais de donner sa place à l'opposition démocratique pour engager, dans les meilleurs délais, une transition qui installe l'Algérie dans notre siècle”, a-t-il expliqué. Ses arguments sont que “le potentiel démocratique et républicain dans le pays dépasse largement les limites organiques de notre parti, mais nous devons bien savoir que ce segment ne se révélera et ne s'exprimera, de façon efficace, que si chaque militante et chaque militant du RCD s'implique et s'investit dans cette alternative vitale pour la nation”. Dans ce cadre, il se dit convaincu que l'opposition démocratique a une occasion historique de faire valoir ses sacrifices et ses ambitions. “La conjoncture est favorable à une réappropriation de l'investissement politique originel qui a, tout à la fois, contribué à façonner notre identité partisane et à ouvrir des perspectives à la nation, dans un environnement fait de confusion et de renoncement”, a-t-il soutenu. “Si nous le voulons vraiment, nous pourrons bouleverser l'échiquier politique national pour réaliser nos ambitions”, ajoutera-t-il. Comment ? Trois éléments fondamentaux créent, à ses yeux, une situation totalement inédite et favorable au courant démocratique : premièrement, pour Sadi, “l'ensemble des thèmes sur lesquels on s'est battu constitue aujourd'hui un large consensus, voire même un compromis politique”. Explication : aujourd'hui, personne n'est contre la réforme de l'école, de la justice, de l'administration, du code de la famille et en faveur de la séparation du politique du religieux. Aussi, le leader du Rassemblement exige, à ce propos, un positionnement clair des acteurs politiques démocratiques sur les grandes questions nationales. “Les positions et les propositions de chacun doivent être précisées : laïcité, économie de marché couplée à la justice sociale, question identitaire, statut de la femme et droits de l'Homme, réformes de l'école, de la justice et de l'administration et résistance citoyenne ont été annoncés et assumés dans des périodes où l'encadrement national, gagné par la paupérisation, atteint par une répression particulièrement pernicieuse et ciblé par le terrorisme, n'a pu, ni participer à la réflexion ni se mobiliser pour ancrer davantage le projet de refondation nationale.” Deuxièmement, aux yeux du patron du RCD, “le régime, fondamentalement antidémocratique, est en train de voler en éclats”, estimant qu'“un régime fragile est infiniment plus facile à vaincre et sa faillite est une chance pour la perspective démocratique”. Troisièmement, la mouvance islamiste est en net recul. Aussi, dans cette perspective, Saïd Sadi estime que, “seul, le RCD ne pourra pas imposer le projet de refondation nationale”. Mais “sans le RCD, estimera-t-il, rien n'est possible pour l'opposition démocratique”. “Si aujourd'hui nous nous persuadons de cette mission et de sa faisabilité, alors, nous aurons fait faire un grand pas au Rassemblement et rendu un service immense au pays”, souligne Sadi. Le RCD participera-t-il à la présidentielle ? La participation du parti de Saïd Sadi est tributaire des changements que peut subir l'actuel dispositif électoral. “Il faut, dira l'orateur, que les pouvoirs publics expliquent les conditions de préparation, de déroulement et d'exploitation du vote.” Pour Sadi, il s'agit de savoir, concrètement parlant, “s'il y aura des observateurs étrangers. Le vote dans les casernes va-t-il être supprimé ou non ? Le corps électoral va-t-il être définitivement stabilisé et connu précisément ? Le vote de l'émigration va-t-il être oui ou non protégé ?”. Aussi, pour lui, “ce sont des procédures simples et stratégiques qui peuvent sécuriser les élections”. N. M. Un colloque international le 16 octobre prochain Le RCD compte organiser, le 16 octobre prochain, un colloque international à Alger. L'objectif de ce colloque est de “redéfinir la place de l'Algérie dans son espace géostratégique naturel et qui jettera les bases d'une conception actualisée du rôle de notre pays dans la coopération démocratique du bassin occidental de la Méditerranée”, a expliqué Saïd Sadi dans son allocution d'ouverture. Il annoncera que “les partenaires étrangers et nationaux seront invités, à cette occasion, à offrir un éclairage qui dépasse le ronronnement et les archaïsmes qui ont étouffé notre potentiel économique et brimé nos ambitions politiques nationales et internationales”. Par ailleurs, le RCD tiendra, à la fin septembre, une convention régionale de l'émigration. Le 25 septembre prochain sera sanctionné par un conseil national d'évaluation et de mise en perspective des initiatives du parti de Saïd Sadi. Les états généraux des démocrates républicains du Rassemblement interviendront, pour leur part, le 30 octobre prochain. Ce rendez-vous, très attendu par le parti, intervenant, par ailleurs, à la veille du 1er Novembre et de la commémoration du premier anniversaire de la convention de Tipasa, aura à mobiliser et à rassembler l'opposition démocratique.