Dans la longue série des harcèlements des journalistes, un nouveau palier vient d'être atteint. Après les suspensions de titres, les arrestations illégales et arbitraires, la confiscation par la police de la carte professionnelle d'une journaliste de l'APS, on en vient à la violation de la franchise des rédactions. Le 1er octobre 2003, la police a interpellé le directeur du Soir d'Algérie et deux de ses journalistes dans les locaux mêmes du journal. Il s'agit assurément d'une grave dérive qui ne laisse planer aucun doute sur les intentions réelles de ses auteurs. En persistant à faire intervenir les services de police dans des affaires que seule la justice et l'instance professionnelle des journalistes sont habilitées à traiter, les tenants de l'ordre policier veulent humilier une corporation mobilisée pour la défense des libertés démocratiques. Gravement préoccupé par les coups de boutoir répétés contre la presse, le Conseil supérieur de l'éthique et de la déontologie, instance professionnelle indépendante et dûment mandatée par les journalistes, estime que ces agissements augurent de périls certains contre les libertés. Il n'échappe à personne que les tentatives qui visent à bâillonner les journalistes à travers le harcèlement de la presse privée, après avoir réduit au silence, par la censure et l'autocensure, les professionnels de la majorité des médias publics, sont l'illustration d'un ordre policier indigne de la société algérienne. Le Conseil supérieur de l'éthique et de la déontologie, qui ne saurait déroger à sa mission première, à savoir la défense du droit à l'information, à la libre expression et à la critique, s'indigne des manœuvres qui tendent à prendre en otages les journalistes dans un conflit politicien qui ne les concerne pas, de même qu'il s'élève avec véhémence contre toute tentative visant à terroriser le journaliste pour l'éloigner de sa seule mission, celle d'informer l'opinion publique. Par ailleurs, le Conseil supérieur de l'éthique et de la déontologie appelle l'ensemble des journalistes, du privé comme du public, à rester unis autour de la défense de la liberté de la presse et du droit à l'information, tout en s'acquittant honorablement de leur mission d'informer, dans le respect des règles de l'éthique et de la déontologie universellement reconnues. Sans parti pris, mais avec conviction et détermination, le Conseil supérieur de l'éthique et de la déontologie ne ménagera, pour sa part, aucun effort pour défendre ces principes. Il en appelle d'abord à la vigilance citoyenne devant ces menaces contre la liberté d'expression et la démocratie et se réserve le droit d'alerter les associations professionnelles et les ONG engagées dans la défense de la liberté de la presse et les droits de l'Homme et d'en appeler à leur solidarité.