Le rapporteur onusien, Frank La Rue, a choisi Oran, la seule ville en dehors de la capitale, pour y poursuivre ses contacts afin de mieux s'informer et s'imprégner de la réalité de la liberté d'opinion et d'expression dans notre pays. Dans son agenda du vendredi soir, une rencontre et des entretiens, notamment avec le président du Snapap, Malaoui Rachid, qui dressera un état des lieux de la sphère syndicale autonome, rapport écrit à l'appui sur le harcèlement subi par les syndicalistes, ainsi qu'avec des membres de la société civile, militants associatifs, syndicalistes, journalistes, chômeurs, membres de la CNCD-Oran, étudiants… Très attentif, Frank La Rue a découvert, au travers des témoignages de journalistes, les conditions dans lesquelles ils travaillent et les pressions et autres intimidations vécues dans l'exercice de leur métier. Ainsi, fut évoquée l'arrestation, le 5 mars dernier, de 10 journalistes d'Oran venus couvrir un rassemblement de la CNCD locale à la place du 1er-Novembre. Le cas d'une journaliste licenciée, suite à cet évènement, fut encore longuement abordé et le rapporteur de se faire préciser les conditions et raisons des arrestations des journalistes ainsi que les suites de l'affaire. Lors des discussions, l'envoyé spécial de l'ONU a entendu les témoignages de militants de la CNCD-Oran victimes, eux aussi, d'intimidations, d'enquêtes policières sur leur lieu de travail, arrestations, ainsi que les mille et un procédés utilisés par l'administration pour refuser de leur accorder des autorisations ou empêcher l'affichage lors de leurs activités politiques. Le cas de Dalila suscitera beaucoup d'attention : il s'agit de cette chômeuse de Mostaganem qui devra comparaître, dans les jours à venir pour “incitation à un rassemblement non armé” pour avoir seulement distribué un appel à un regroupement de chômeurs à Mostaganem. Très au fait de cette affaire, dénoncée de toutes parts, Frank La Rue apprendra, encore, les pressions et intimidations que subit cette dernière jusqu'à son domicile, les interrogatoires répétés par les services de sécurité et le rapporteur de lui assurer : “Nous suivrons votre affaire ce 28 avril”, date de son procès. Le représentant du comité national des chômeurs, originaire du Sud, livrera avec beaucoup d'émotion le vécu des chômeurs, leur misère, le mépris, le déni de droit qui leur est fait, ce qui a poussé nombre d'entre eux à s'immoler par le feu.