Les décisions prises par le chef de l'Etat lors du Conseil des ministres tenu lundi n'ont pas gagné l'adhésion de certains partis et figures de l'opposition. Icône du combat pour les droits de l'Homme en Algérie et cheville ouvrière de la CNCD, Ali Yahia Abdennour voit dans la décision de confier le chantier de la révision constitutionnelle à son homme de confiance, Abdelkader Bensalah, une volonté du chef de l'Etat “de préparer sa propre succession à l'intérieur du système”. “La succession familiale étant définitivement écartée, Bouteflika veut organiser une succession au profit de son clan”, analyse-t-il, avant de présumer : “Dans les jours à venir, on va voir ce clivage entre un Président qui veut se maintenir et, de l'autre côté, des gens à l'intérieur et à l'extérieur du système qui veulent que le Président parte.” Pour le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), la tenue d'un Conseil des ministres à la veille de la Journée mondiale de la liberté de la presse est “une provocation irresponsable et criminelle”. “Le but de cette sortie est à la fois de masquer les divergences du sérail et de faire diversion sur les tensions politiques et sociales qui constituent la réalité nationale d'aujourd'hui en donnant à penser que le chef de l'Etat est toujours valide, qu'il est installé dans la durée et qu'il faut compter avec les mêmes politiques et le moyen terme”, analyse le RCD dans un communiqué rendu public hier, avant d'asséner : “Au lieu de s'engager dans une dynamique de changement pour restaurer la confiance du citoyen qui exige transparence et rénovation, le chef de l'Etat s'enfonce dans la ruse, l'opacité et la concentration des pouvoirs.” Pour le parti de Saïd Sadi, le régime de Bouteflika est en déphasage total avec les préoccupations de la rue. “Notre peuple, notamment sa jeunesse, clame quotidiennement sa demande de changement. Au lieu de prendre la mesure du désespoir et de la colère populaires, expressions d'une crise morale et politique grave et profonde, le gouvernement répond par la fuite en avant, essayant de se persuader que le statu quo est toujours possible”, explique-t-il. “Les prétendues réformes annoncées seront initiées, arbitrées et validées par un chef de l'Etat "élu" dans un scrutin qui a vu une participation de 11,3% de l'électorat. C'est le même personnage qui a violé la Constitution pour se donner une présidence à vie qui se présente soudainement en animateur d'un nouvel ordre constitutionnel”, ajoute-il encore. Le parti Ahd 54 ne donne pas l'air de ne pas trop croire aux “réformes” du chef de l'Etat. “Nous constatons que le pouvoir reste toujours dans le même schéma. Lors du dernier Conseil des ministres, on nous a ressorti les mêmes propositions de réformes proposées le 15 avril dernier avec une seule évolution : la désignation de Abdelkader Bensalah comme intermédiaire du Président”, relève M. Benalou, chargé de communication du parti de Faouzi Rebaïne. Pour lui, confier le chantier des réformes à un “gouvernement ayant prouvé son incapacité à solutionner les problèmes des Algériens” n'est pas “la véritable solution”. “Il faut engager une période de transition qui sera gérée par un gouvernement de transition avant d'aller à une élection présidentielle anticipée.” Le Front des forces socialistes (FFS), lui, a signifié, le 25 avril dernier, son refus de faire partie de la commission qui planchera sur la révision constitutionnelle. “La priorité pour le FFS est d'aller vers la démocratie, pas vers la révision de la Constitution”, a tranché Karim Tabou.