Les deux fois où nous avons rencontré Houria, elle était toujours avec ses deux enfants mineurs, sa fille Roumaïssa l'aînée et Abdelsamen le garçon au regard fuyant, la tête enfoncée dans les épaules comme s'il voulait s'effacer, se rendre invisible, disparaître aux regards des autres. Houria vit dans le taudis “el ferma” entre le quartier d'El-Barki et Sidi Chahmi à l'est d'Oran, elle, son mari et leurs deux enfants, après avoir fui Tiaret au plus fort de la décennie noire, pour débarquer sans rien, dans ce no man's land de gourbis. Son mari fait partie de ces victimes du terrorisme jamais comptabilisées, jamais reconnus. Ouvrier agricole dans la région de Tiaret, il a assisté à des massacres et à des exactions des terroristes. Il en perdra l'esprit, sombrant dans une folie douce qui l'a totalement déconnecté de la réalité, nous racontera Houria. Incapable de travailler de manière permanente, c'est elle qui tente tant bien que mal, de subvenir aux besoins de sa famille, revendant du pain sec, faisant dans la récupération, lorsque la charité des uns et des autres, ne permet plus de tenir. Pour Houria, l'urgence aujourd'hui, est de protéger ses enfants surtout son garçon. Et pour cela, elle est prête à tout, comme n'importe quelle mère, même si elle doit aller jusqu'à s'en séparer : “J'ai demandé à la DAS de venir les prendre pour qu'elle les éloigne de ceux qui nous agressent. J'ai peur le soir, ou quand Abdelsamen sort parce qu'il veut jouer comme tous les autres. J'ai toujours peur ! C'est pour cela que je les prends avec moi, quant ils sortent de l'école je vais les attendre quant je peux.” Houria nous expliquera ainsi son calvaire qui dure depuis deux ans, subissant les agressions, les menaces, la violence d'un individu et de ses proches qui, selon elle, veut lui “soutirer par la force son quitus d'attribution d'un logement social” par les services locaux. Elle évoque même l'agression sexuelle dont a été victime son garçon à deux reprises, exhibant les certificats médicaux, constatant en effet, la tentative de viol. Et sans compter les coups reçus par des jets de pierres. Bien sûr, Houria a bien tenté de se plaindre auprès de la gendarmerie, de déposer plainte, de faire des constats, mais elle s'est retrouvée plusieurs fois passant du statut de plaignante à celui de coupable, lorsqu'il ne lui sera pas signifié qu'elle était une femme à problèmes, une mauvaise mère. Plusieurs actions en justice ont été introduites par elle ou ses agresseurs. Cette mauvaise mère nous l'avons rencontrée, répétant à qui veut l'entendre que la DAS doit sauver ses enfants.