L'Union européenne aura bientôt son représentant spécial pour la rive sud de la Méditerranée ! De quoi ne pas réjouir le président français qui vient justement de relancer son projet d'Union pour la Méditerranée. Bloquée dès sa fondation pour les arrière-pensées hégémonistes de Paris et par le refus d'Israël membre de la nouvelle architecture euro-méditerranéenne, de se plier au droit et aux résolutions internationales sur la question palestinienne, affectée par les mouvements populaires dans les pays, l'UPM avait cessé de fonctionner dès lors que Ben Ali et Hosni Moubarak, ses “piliers”, avaient été chassés par leur peuple. Néanmoins Nicolas Sarkozy ne s'était pas pour autant avoué vaincu. Loin s'en faut. Le président français qui estime s'être refait une virginité dans les rives sud de la Méditerranée avec sa nouvelle politique de soutien aux révolutions tunisienne et ses encouragements aux pouvoirs en place encore fréquentables pour qu'ils procèdent à des réformes démocratiques, vient de redonner vie à son “bébé” en faisant installer le 5 juillet à Barcelone le Marocain Youssef Amrani dans fonctions de secrétaire général de l'UPM. L'ancien du ministère des AE du Maroc doit donc réaliser la grande ambition de Sarkozy de mettre en mouvement l'institution qu'il a créée en 2008, et qui regroupe 43 Etats de l'UE et des pays riverains de la Méditerranée. Avec le même cahier des charges mais sous le nouveau slogan dans l'air du temps : “Intégration régionale et démocratie doivent aller de pair en Méditerranée. Dans le contexte des révoltes et de la contestation qui secouent actuellement le monde arabe l'UPM peut jouer un rôle important”, a déclaré Amrani lors de son installation par le ministre des AE français. Il s'agit en fait pour la France de faire oublier le processus euro-méditerranéen lancé en 1995 à Barcelone et qui s'est embourbé dans le conflit israélo-arabe. Et de faire oublier également que dans l'ancienne mouture de l'UPM, Sarkozy avait joué à fond la caisse les autocrates les dictateurs contre les peuples du sud de la Méditerranée. Conscient de ses étroites marges de manœuvre politiques dans une région où se bousculent les intérêts de toutes les grandes puissances et où les peuples ne sont plus disposés à se laisser dévorer comme auparavant, Sarkozy a instruit Amrani à travailler sur des projets concrets pour la modernisation des pays méditerranéens, en priorité l'aide aux PME, la promotion du secteur de l'énergie propre, particulièrement le plan solaire méditerranéen, la mobilité des jeunes et des étudiants… À charge du nouveau secrétaire général de hiérarchiser ces projets et de leur trouver les financements nécessaires ! Une chose est certaine, Sarkozy devait faire une croix sur l'assistance de Bruxelles qui a décidé de marcher dans ses plates-bandes. Bruxelles s'apprête à nommer un représentant spécial pour la rive sud de la Méditerranée avec pour mission de densifier la politique de l'Union européenne (UE) dans la région et d'accroître son influence dans le contexte des mutations rapides édictées par le “printemps arabe”. Ce nouveau poste devrait être attribué après approbation des 27 pays membres de l'UE, à un diplomate espagnol qui connaît bien la région pour avoir longtemps travaillé sur le dossier du conflit du Moyen-Orient. Il s'agit de Bernardino Leon, haut conseiller en matière de politique étrangère au sein du gouvernement espagnol. Longtemps accusés de fermer les yeux sur les régimes autoritaires en place avant le début du “printemps arabe”, les 27 membres de l'UE entendent se repositionner dans cette région stratégique, en adoptant une nouvelle approche pour mieux défendre leurs intérêts économiques et géostratégiques dans les cinq pays d'Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye et Egypte) ainsi qu'en Mauritanie. Une UPM version Bruxelles et, à l'inverse du projet de Sarkozy, avec des moyens financiers et une ingénierie de coopération et d'assistance rodée. Aux yeux de l'UE, l'UPM ne serait pas en mesure de barrer le chemin autres puissances comme les Etats-Unis ou la Chine qui veulent mettre pied à terre dans les rives sud de la Méditerranée avec l'avènement attendu de nouveaux régimes plus démocratiques. Le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité commune, Catherine Ashton, qui a proposé officiellement le 29 juin au Conseil européen de nommer le diplomate espagnol Bernardino Leon, au poste de représentant spécial de l'UE pour la région du sud de la Méditerranée, a affirmé que le nouveau représentant spécial européen est une première réponse accélérée de l'UE aux transformations chez ses voisins du sud de la Méditerranée. Selon la responsable européenne, les Vingt-Sept souhaitent renforcer leur influence dans ces pays géographiquement proches et adopter une politique méditerranéenne plus claire. Bruxelles, qui a déjà promis une aide économique substantielle de plusieurs milliards d'euros à l'Egypte et à la Tunisie pour accompagner les changements en cours et encourager les réformes annoncées, entend ainsi se réconcilier avec les peuples d'Afrique du Nord qui lui reprochent d'avoir toujours soutenu les dictatures. Mais, pareilles initiatives suffiront-elles pour l'ouverture d'une nouvelle page dans les rapports Nord-Sud ?