Le président sénégalais est passé à la contre-offensive en organisant une démonstration de force à Dakar destinée à soutenir sa candidature à la présidentielle de 2012 qui venait d'être contestée par ses opposants. Les partis politiques contre son maintien ainsi que son projet de transmettre le pouvoir à son fils Karim ne sont pas dupes, la manifestation populaire a été cousue de hautes mains. Réunir des foules est une spécialité de régimes africains, comme le sont les tripatouillages de la Constitution et les scrutins dit ouverts. Fermer le grand boulevard de la capitale, installer quelques griots et des buvettes, ramener des populations des banlieues et le tour est joué. Les journalistes devaient par ailleurs constater des centaines de cars garés à proximité de ce boulevard. Cette réunion s'est tenue peu après un rassemblement d'opposants, auquel ont participé plusieurs milliers de personnes qui réclamaient eux qu'il ne se représente pas en 2012 et qui s'est tenu sur la place de l'Obélisque de Dakar. “Non à un troisième mandat de Wade”, “Wade go, Wade out”, “Wade dégage”, pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants. Les grands leaders de l'opposition, dont celui du Parti socialiste (PS), Ousmane Tanor Dieng, de la société civile, mais aussi d'anciens proches du président comme son ex-premier ministre Idrissa Seck, avaient tour à tour pris la parole, saluant une mobilisation exceptionnelle, formidable. L'opposition exige le départ du ministre de l'Intérieur, obstacle à une élection “transparente”. La mobilisation de l'opposition dure depuis un mois jour pour jour après des émeutes qui avaient fait une centaine de blessés devant l'Assemblée nationale, au moment où les députés examinaient un projet de loi décrié visant à faire élire un président et un vice-président avec un minimum de 25% des voix au premier tour de l'élection présidentielle de février 2012. Acculé par la contestation populaire et de vives critiques à l'étranger, le président Wade, âgé de 85 ans, avait finalement retiré le texte. La manifestation de la place de l'Obélisque a été organisée par le Mouvement des forces vives du 23 juin (M23), créé après cette journée de violence, et qui rassemble partis politiques d'opposition et organisations de la société civile exigeant que Wade ne soit pas candidat à sa succession. Pour les dirigeants du M23, le Sénégal a besoin d'institutions fortes, pas d'hommes forts, paraphrasant le président américain Obama qui régissant contre la tendance des chefs d'Etat africains à modifier leur Constitution pour garder le pouvoir. Wade, élu en 2000 pour sept ans, réélu pour cinq ans en 2007 après une réduction du mandat présidentiel, est à nouveau candidat à sa propre succession l'année prochaine !