Le président sénégalais a réitéré sa proposition d'organiser une élection présidentielle anticipée, déjà rejetée par l'opposition et la société civile, la date normalement prévue du premier tour étant fixée au 26 février 2012. Wade est si sûr de l'issue des élections qu'il crédite ses opposants pressés de le voir parti de 10 à 15% des suffrages. Bien que les sondages dans le pays ne soient pas fiables, il reste certain que l'opposition aura des difficultés à débouter Wade, tant ses rangs sont dispersés, voire antagonistes. L'opposition souhaite le départ de Wade mais jusqu'ici aucune personnalité n'a encore émergée de ses rangs pour se poser comme alternative. Wade, sur ce sujet, joue, en effet, sur du velours, bien que son sort reste également hypothétique. Nonagénaire, le président sénégalais avait une première fois proposé le 14 juillet une présidentielle anticipée à laquelle il serait candidat, lors de son premier discours public après les émeutes du 23 juin qui avaient fait une centaine de blessés à Dakar. Le Mouvement du 23 juin, rassemblement de partis d'opposition et d'organisations de la société civile, ainsi appelé en référence aux évènements survenus à cette date, a rejeté cette proposition de scrutin anticipé. Le mouvement exige le retrait de la candidature de Wade, élu une première fois en 2000 pour sept ans et réélu en 2007 pour un mandat de cinq ans, affirmant que sa candidature pour un nouveau mandat serait anticonstitutionnelle. Les émeutes du 23 juin s'étaient produites alors que l'Assemblée nationale examinait un projet de loi controversé du chef de l'Etat pour faire élire au scrutin de 2012 un président et un vice-président avec un minimum de 25% des voix au premier tour ! Wade qui n'avait pas pu vendre la candidature de son fils avait décidé de refaire un nouveau mandat avec Karim comme vice-président pour lui transmettre par la suite le fauteuil présidentiel. Sous la pression de la rue et des critiques à l'étranger, il a abandonné son hold-up politique. Le président sénégalais avait pourtant bien préparé sa mise en scène. Il avait même essayé de requérir la caution d'Obama et de Sarkozy, qu'il avait rencontrés au sommet du G20 à Deauville en France en tant qu'animateur du Nepad. Au sommet, beaucoup de Sénégalais furent choqués de le voir présenter son fils, Karim aux présidents américain et français, comme pour leur désigner indirectement son successeur dans une subtile mécanique de dévolution monarchique du pouvoir. Pour ses propres ambitions, Wade est allé jusqu'à aider la France dans son opération de déstabilisation de Kadhafi. Wade s'est rendu à Bengazi, siège de l'insurrection libyenne pour fustiger le Guide libyen accusé de ne pas lâcher le pouvoir. Sa charge n'a pas fait illusion ni chez lui ni ailleurs en Afrique. Wade comme tous ses pairs africains, une fois arrivé aux affaires, il a pratiqué la politique de “j'y suis, j'y reste”. Plus est encore, son fils Karim avait sollicité le 11 juillet dernier, le conseiller officieux de Sarkozy, Robert Bourgi, une pièce maîtresse de la Françafrique, pour une intervention rapide de l'armée française au Sénégal, pendant les émeutes ! Et Wade n'a pas pour autant arrêté d'intriguer pour imposer son héritier à la tête du Sénégal. Karim, analyste financier, a été nommé conseiller de son père en 2001, puis il a été battu dans son propre bureau électoral au scrutin pour la mairie de Dakar en 2009, pour se voir confier la présidence du conseil de l'Agence nationale de l'Organisation de la conférence islamique qui a organisé le sommet de la Conférence islamique à Dakar, avec de multiples scandales sur la gestion de son budget. À 40 ans, le fiston est bombardé ministre d'Etat en charge de la Coopération internationale, de l'Aménagement du territoire, des Transports aériens et des Infrastructures. Un super département taillé juste pour le dauphin. Abdoulaye Wade, qui accéda à la magistrature suprême par une élection qualifiée de modèle pour l'Afrique, n'est plus cet homme respecté par les siens et dans le continent. Il a tout gâché avec son ambition d'instaurer une république dynastique. Le “Sopi” (changement en ouolof), avec lequel il inaugura son magistère, n'est plus qu'un hideux avatar.