Le nomadisme politique, une pratique spécifiquement algérienne, et l'obligation pour les ministres candidats de démissionner trois mois avant le scrutin, deux dispositions qui ne sont pas du goût du FLN et du MSP. C'est aujourd'hui que le projet de loi organique portant régime électoral sera examiné à l'Assemblée populaire nationale (APN). Après son examen par la commission juridique de l'Assemblée nationale durant une dizaine de jours, ce texte de loi adopté en Conseil des ministres le 9 septembre dernier sera soumis aux députés en plénière pour débat. Cependant, ce texte de loi ne passera pas comme une lettre à la poste à l'instar des précédents textes examinés par la Chambre basse du Parlement. Et pour cause, il fait l'objet d'une polémique. Et ce sont précisément deux articles de cet avant-projet de loi qui posent problème aux députés. Il s'agit de l'article 67 qui parle de “nomadisme politique” et de l'article 93 qui évoque la candidature à la députation des ministres. Plus précisément, l'article 67 de la loi stipule que sera “déchu de plein droit de son mandat électif tout élu qui aura rejoint, en cours de mandat, un parti politique autre que celui sous l'égide duquel il a été élu en qualité de membre de l'Assemblée populaire nationale, du Conseil de la nation, d'une Assemblée populaire communale ou de wilaya”. Et l'article 93 énonce que “(…) lorsque le candidat [à la députation, ndlr] est un membre du gouvernement, il doit déposer sa démission trois mois avant le scrutin”. Il faut dire que l'article 93 déplaît fortement aux partis de l'Alliance présidentielle : le Rassemblement national démocratique (RND), le Front de libération nationale (FLN) et le Mouvement de la société pour la paix (MSP). En ce sens que les ministres de ces formations qui comptent prétendre à la députation refusent de quitter le gouvernement trois mois avant l'élection législative. Et ce refus au sein du gouvernement s'est répercuté sur le travail de la commission juridique de l'APN. Dans ce cadre, même si la commission juridique n'a pas apporté d'amendement à cet article, il n'en demeure pas moins qu'il sera présenté en plénière pour débat. Et c'est le député FLN Hocine Khaldoun, ancien président de la commission juridique et vice-président du groupe parlementaire de ce parti, qui le dit. “L'article 93 sera soulevé lors des débats”, lance-t-il. Interrogé sur le problème que pose cet article ainsi que la position du FLN à son égard, Khaldoun indiquera que “la position politique du FLN vis-à-vis de cet article est qu'on le trouve inopportun”. Selon le député, cet article n'a pas de raison d'être. Son argument est que “si on reproche aux ministres d'utiliser les moyens de l'Etat, il y a une instruction qui les empêche de le faire. De plus, il y a des directeurs qui utilisent plus de moyens que les ministres”. S'appuyant sur le principe de séparation des pouvoirs, notre interlocuteur, contacté par téléphone, notera que “le député membre du pouvoir législatif et le ministre de l'exécutif sont tous deux éligibles. Alors, je ne vois pas pourquoi pose-t-on cette condition aux ministres”. Sur sa lancée, il indiquera qu'“il n'y a pas de régime politique à travers le monde qui énonce une telle condition de démission aux ministres candidats”. Un autre argument est avancé par le ministre : “La démission des ministres va créer un vide au sein de l'Exécutif qui va paralyser le gouvernement.” “Et on ne peut mettre en place un gouvernement transitoire pendant trois mois. Cela ne s'est vu dans aucun pays du monde”, note-t-il, avant d'interroger : “Pourquoi alors ne parle-t-on pas de la candidature du Premier ministre ?” Selon lui, l'introduction de l'article 93 au sein de la loi électorale “est une atteinte à l'Etat”. “On a institué cet article sans penser aux conséquences”, dit-il. Quoi qu'il en soit, l'article 93 de la loi électorale peut être véritablement remis en cause si les députés FLN trouvent des alliés au sein du RND et du MSP pour le rejeter. Ce qui ne représente pas une certitude puisqu'hier, le président du groupe parlementaire du RND, Miloud Chorfi, a expliqué que la position des députés de son parti est l'approbation des textes du gouvernement dans leur première mouture. Cependant, Chorfi n'a pas écarté la possibilité de voir la loi électorale amendée “mais dans le même sens que l'esprit des réformes”, a-t-il dit. S'agissant de l'article 67 interdisant le nomadisme politique, la commission juridique l'a carrément supprimé. Sa suppression est une revendication du FLN, note notre source. Il faut dire qu'à l'occasion des débats au sein de la commission juridique, ses membres ont plaidé sa suppression, estimant que “le mandat est populaire et non pas partisan et sa suppression pour cause de changement de parti est une atteinte à la souveraineté populaire”. À ce sujet, il est utile de noter que le Parti des travailleurs a été la seule formation politique qui a dénoncé cet article. Ce faisant, aujourd'hui, ces deux articles feront l'objet d'intenses débats et polémique. Et ce sont les alliances éventuelles qui décideront de l'avenir de ces deux articles au sein de la loi électorale. Hier, les différents groupes parlementaires battaient le rappel de leurs troupes pour une mobilisation accrue en vue d'amasser un maximum de voix en faveur de leurs positions respectives. À suivre.