Le compte à rebours, pour les élections législatives, a commencé et les nouveaux partis pourront bientôt tenir leur congrès constitutif. Les assurances du ministre de l'Intérieur quant à la recevabilité d'une douzaine de dossiers, sur la vingtaine déposée, renseignent sur la volonté du gouvernement de faciliter la création des nouveaux partis et de leur permettre de tenir leur congrès dans des délais plus ou moins raisonnables, afin de pouvoir s'atteler à la préparation du scrutin de mai prochain. Tout en affirmant que la porte restait ouverte pour les autres partis, Daho Ould Kablia conditionne tout agrément par la tenue du congrès constitutif qui sera le véritable test pour ces nouvelles formations, que ce soit pour ce qui est du programme politique ou de la composante humaine. Une fois la loi sur les partis promulguée, les choses devraient s'accélérer et permettre de voir à quoi ressemblera la scène politique nationale “version réformes”. Mais, déjà, l'on a une petite idée sur les partis qui feront le plus parler d'eux en mai prochain. Printemps arabe oblige, toute l'attention va vers les partis islamistes, agréés ou à venir. Si le MSP s'est vite mis dans la peau d'un opposant, sans trop convaincre, les autres partis islamistes à venir sont sûrs que la victoire, en mai prochain, sera islamiste. Mais cette “vague verte”, que l'on donne pour certaine, risque de se présenter sous forme d'une floraison de petits partis qui formeraient, dans leur globalité, une force non négligeable dans la future assemblée. Pour des questions de leadership, ou pour des divergences passées ou présentes, les leaders de ces nouvelles formations seraient tentés, chacun de son côté, d'affirmer son assise. Or, c'est là où réside le véritable défi pour les islamistes, pressés de “battre le fer tant qu'il est chaud”. Pour Abdallah Djaballah, qui a occupé les devants de la scène ces derniers temps, et que certains voudraient présenter comme le futur homme fort du courant islamiste, l'équation est simple : il faut s'allier aux autres partis islamistes, au risque de se discréditer complètement. Djaballah, dont l'influence se limite à quelques villes de l'est du pays, voudrait bien avoir l'appui des anciens dirigeants de l'ex-Fis, une sorte de caution morale, car ne disposant pas de base populaire dans la majeure partie du pays, il sait qu'il risque de se faire ridiculiser. Abdelmadjid Menasra paraît mieux loti, lui qui a déjà exercé dans le MSP et dans le gouvernement. Il compte, évidemment, sur les déçus de la politique de Abou Djerra Soltani au sein du MSP, mais se présente, lui aussi, comme fédérateur des islamistes pour l'élection de mai prochain. Mais, pour le moment, personne ne sait comment Menasra réussira-t-il à s'implanter, au moins dans les grandes villes pourvoyeuses du maximum de sièges, en si peu de temps ? Ses appels répétés en direction des anciens du FIS et des autres formations islamistes, à l'exception du MSP, trahissent quelque peu la difficulté de la tâche qui l'attend. En attendant de voir ce qu'adviendra du parti d'Ahmed Taleb el-Ibrahimi et Mohamed Saïd, il est une évidence qui saute aux yeux : les islamistes croient en leur victoire et vont tout faire pour y parvenir. De quelle manière ? Les choses ne sont pas tout à fait claires pour le moment, mais la thèse la plus plausible serait que les formations d'obédience islamiste soient présentes en force dans la future assemblée, mais de façon émiettée. L'éventualité d'une victoire islamiste a été écartée par le ministre de l'Intérieur. Avant lui, c'était Belkhadem, le patron du FLN, qui était allé jusqu'à donner un seuil que ne sauraient dépasser les formations islamistes, soulevant un tollé général. Pour le moment, seul le RND semble ne pas trop s'inquiéter du “péril vert” et dit accepter les résultats du scrutin, peu importe le vainqueur. Reste les partis de la mouvance démocratique. Hormis le FFS qui se dirige vers une participation au scrutin législatif, probablement convaincu des garanties miroitées par le pouvoir, le RCD semble opter pour le boycott, lui qui remet en cause la régularité du futur scrutin et qui demande le report de cette consultation. Les nouvelles formations, notamment celle de Amara Benyounès, risquent de grignoter ce qui reste de la base du RCD, mais pas seulement, puisque même des cadres du RND auraient été approchés par l'UDR. Le parti de Sid-Ahmed Ghozali, quant à lui, reste une grande inconnue. Mais il serait prématuré d'annoncer des “quotas” au sein de la future assemblée. Les islamistes, donnés favoris, pourraient se retrouver divisés dans une foultitude de petites formations. Les démocrates, donnés hors course, pourraient faire preuve de résistance et de pugnacité et maintenir leur présence, au moins, au niveau actuel des choses. Le courant nationaliste tentera de limiter les dégâts, lui qui pourrait être la cible de toutes les attaques durant la campagne électorale. Mais, là aussi, il ne faut pas négliger le poids des notabilités locales dans la désignation des futurs députés. Les zaouïas n'ont rien perdu de leur influence, et elles seront de nouveau l'objet de toutes les sollicitudes. Enfin, et ce n'est pas négligeable, le pouvoir de l'argent fera son entrée en force dans cette élection. La “chkara” fera, sans aucun doute, la différence dans bon nombre de circonscriptions électorales. Election jouée d'avance ? Victoire islamiste incontestable ? Pas si évident que ça. A.B.