Le Conseil français du culte musulman (CFCM) sera doté d'une présidence tournante comme souhaitée par Dalil Boubakeur. Annoncée fin décembre, une réforme du Conseil français du culte musulman (CFCM) est sur la voie d'être finalisée. Principale nouveauté : la mise en place d'une présidence tournante souhaitée par Dalil Boubakeur qui, en contrepartie, n'a pas hésité à renier quelques principes défendus par la Fédération de la Grande-Mosquée de Paris et sacrifier les intérêts de ses troupes dans les régions. Fruit d'une consultation entamée par Jean-Pierre Chevènement en tant que ministre de l'Intérieur dans le gouvernement de gauche, le CFCM est né en 2003. Une naissance au forceps provoquée par Nicolas Sarkozy, très soucieux, en arrivant à la place Beauvau, de contrôler l'islam. Les attentats du 11 Septembre ont imprimé une vision sécuritaire de l'islam de France qui prospérait dans les caves d'immeubles, faute de lieux adéquats. À sa création, le CFCM a été présidé par Dalil Boubakeur. Ce fut alors un cadeau de Nicolas Sarkozy et du président Jacques Chirac au recteur de la GMP. En raison du prestige de cette vieille institution, ils avaient fait l'impasse sur une élection telle que prévue par les statuts. Elle aurait abouti à une disqualification de M. Boubakeur en raison d'un mode de scrutin basé sur la surface contrôlée par chacune des trois grandes composantes de l'islam de France (Algériens, Marocains et Frères musulmans). Toujours sans passer par les élections, M. Boubakeur a été reconduit pour un nouveau mandat (2005-2008). Lorsqu'il a fallu ensuite passer par les urnes, la Grande-Mosquée de Paris a déserté la bataille, sachant la défaite inéluctable. Le Rassemblement des musulmans de France (RMF), proche du Maroc, a remporté les élections et Mohamed Moussaoui a été porté à la tête du CFCM. En remettant en jeu son poste en juin dernier, la GMP a observé la même attitude de boycott avec les mêmes arguments : la remise en cause du critère de la surface. Dalil Boubakeur a même osé une opération de force à une semaine du scrutin. Il a rassemblé à Lille des troupes venues de toute l'Europe, en présence du secrétaire d'Etat Halim Benatallah, qui a cru pouvoir faire du culte un vecteur de mobilisation de la communauté nationale à l'étranger. Ignorant la décision de Dalil Boubakeur, les fédérations du Languedoc-Roussillon et de Provence-Alpes-Côte-d'Azur ont quand même concouru sous la bannière d'indépendants. Elles ont permis une présence dans les instances du CFCM. Coup de théâtre, Dalil Boubakeur s'est ensuite emparé d'un strapontin en acceptant la présidence d'honneur de l'instance. Aujourd'hui, il demande à intégrer le bureau exécutif. La victoire des islamistes aux législatives marocaines a suscité une certaine inquiétude en France et a précipité l'idée d'une réforme du CFCM. Elle va permettre d'écourter d'un an le mandat actuel de Mohamed Moussaoui qui court jusqu'en juin 2014 et se traduire par l'introduction d'une présidence tournante de deux ans entre les trois principales composantes du CFCM. Les réunions se sont multipliées ces dernières semaines entre les autorités et les représentants de l'Islam. Selon des informations de Liberté, Dalil Boubakeur a obtenu l'assurance d'être désigné en premier. En échange d'un soutien à Nicolas Sarkozy au mois d'avril ? En tout cas, il a bien soutenu Brice Hortefeux, jugé pour des propos racistes tenus contre un jeune d'origine arabe. Si le mode de désignation change pour les instances nationales du CFCM, il demeure en l'état pour les régions où le critère du mètre carré ne sera modifié que d'une manière marginale : une prime sera donnée aux mosquées situées dans les grandes villes où l'affluence est plus grande que dans les campagnes. Dans les fédérations de la GMP, c'est la stupeur. On ne comprend pas que M. Boubakeur concède à garder ce critère qu'il a combattu il y a à peine quelques mois, entraînant dans son analyse le gouvernement algérien. Pourtant, il ne s'est pas privé de charger, il y a quelques semaines, M. Benatallah qu'il a désigné comme le “ministre des Immigrés.” Y S.