Dans cet entretien, le directeur général de Toyota Algérie aborde l'évolution du marché automobile algérien, la question des prix des véhicules, des délais de livraison et des conditions d'emergence d'une industrie automobile dans le pays. Liberté : Comment expliquez-vous le boom actuel du marché de l'automobile ? M. HASSAIM : C'est clair quand on prend les chiffres, on constate qu'il y a une croissance forte. En fait, c'est un retour à la normale. Pendant deux années consécutives, le marché de l'automobile a chuté en 2009, 2010, à cause de l'instauration du crédit documentaire et des effets de la crise financière internationale. En fait, la vraie question qu'il convient de se poser : est-ce que le marché national de l'automobile crée de la valeur ajoutée ? En premier lieu, il faut noter que ce marché crée des emplois. En second lieu, c'est un vecteur de transfert de savoir-faire. En troisième lieu, tous les concessionnaires font dans la formation du personnel local. Le marché de l'automobile est-il dopé par le plan de relance, en particulier par les ventes aux entreprises ? Le marché automobile n'est pas uniquement dopé par la croissance économique. Il est aussi dopé par un comportement sociétal : un grand nombre de citoyens sont à la recherche de mobilité. On n'a pas de statistiques fiables sur la demande en véhicules utilitaires. Les concessionnaires ne sont pas encore dotés d'un outil de gestion de la relation clientèle. Les dernières fluctuations des cours de change ont-elles eu un impact sur les prix des véhicules ? Les fluctuations de change n'ont pas eu un impact significatif sur les prix des véhicules. Mais le marché a tendance à vouloir pousser vers le bas (forte demande sur les entrées de gamme). Mais chaque concessionnaire a sa politique commerciale. Les véhicules commercialisés en Algérie sont-ils conformes aux normes internationales ? Tous les véhicules qui rentrent en Algérie sont homologués. Les services des Mines effectuent le contrôle de conformité. Tous les véhicules des concessionnaires passent par une homologation. L'introduction d'un véhicule est soumise à un visa d'entrée. Les ingénieurs des Mines font le contrôle. Ils puisent des échantillons : ils prennent par exemple 20 véhicules sur 1 000 et effectuent sur l'échantillon un contrôle. À cela s'ajoute un contrôle des véhicules sur documents. Les gens ont tendance à faire le parallèle avec l'Europe où les airbags sont obligatoires. En Algérie, il n' y a pas une norme qui oblige que le véhicule ait un airbag. Quelles sont les normes algériennes en matière d'émissions de CO2 ? Ce n'est pas encore précisé. Il faut que nous travaillions sur la conception de normes algériennes. En somme, tout véhicule introduit en Algérie est homologué. Est-ce que le véhicule doit disposer d'un airbag ? est-ce qu'il doit répondre aux normes européennes en termes d'émissions de CO2 ? Il n'y a pas de normes algériennes sur ces points. Ce sont les pouvoirs publics qui doivent définir ces normes. Pour l'instant, ce sont des choix de politique commerciale. Du reste, est-ce que le pouvoir d'achat de la majorité des Algériens l'accepte ( le véhicule sera plus cher si on respecte les normes européennes ). Beaucoup d'acquéreurs se plaignent des délais de livraison... Chaque concessionnaire a sa propre politique commerciale. Certains modèles ne sont pas disponibles. Nous dépendons des constructeurs qui ne livrent pas uniquement à l'Algérie mais à un grand nombre de pays dans le monde. D'un commun accord avec nos clients, nous fixons un délai de livraison réaliste... En moyenne, le délai de livraison est de deux mois. Le concessionnaire est tenu de livrer le véhicule 45 jours après qu'il soit disponible (au port). Le délai de livraison pour certains peut atteindre six mois. En général, cela ne peut pas dépasser ce délai. Les prix des véhicules ont-ils connu une hausse ces dernières années ? Une forte demande sur tel ou tel modèle explique la hausse des prix. S'il ya une forte demande mondiale sur les produits, cela se répercute sur les coûts. La modernisation des véhicules explique également cette augmentation des prix des véhicules en Algérie La Yaris commercialisée aujourd'hui n'est plus la Yaris d'il y a trois ans. Elle a été modernisée... On a introduit de nouvelles technologies. Les conditions sont-elles réunies en Algérie pour l'émergence d'une industrie automobile ? S'il s'agit d'assemblage, de faire monter des kits, on est prêt à assembler des véhicules particuliers en Algérie. Si un fort taux d'intégration est recherché, cela prendra plus de temps, au moins six ans. Maintenant, est-ce qu'on a plus de vision, en termes de tissu industriel, de fabrication de pièces localement. Les constructeurs, eux, regardent plusieurs paramètres avant d'envisager d'implanter dans un pays une usine de montage de véhicules particuliers : présence économique, apport en valeur ajoutée, chaîne logistique, tissu industriel, qualité des procédures, qualité de la main-d'œuvre. Il faudrait des années pour réunir toutes ces conditions. Mais la question essentielle que se posent les constructeurs, c'est de prévoir des installations industrielles qui produisent en fonction d'une taille critique pour maintenir un coût de production compétitif. K. R.