Résumé : Je passe la nuit dans une pension. Je fus réveillée au petit matin par le chant du coq, mais je ne pus m'extirper de mon lit que vers le milieu de la matinée. Hakim et Farès vinrent me chercher. Pour entamer mon travail, je leur demandais de m'orienter vers une voyante… Ces femmes connaissent tant de secrets ! Le jeune homme jette un coup d'œil à son cousin. Hakim ébauche un sourire : - Si c'est ce que tu veux Yasmina… - Oui… J'aimerais la rencontrer….Est-elle aussi vieille que vous le dites ? - Cette femme n'a pas d'âge. Nous l'avons toujours connue sous le même aspect… On dirait que les années n'ont pas d'impact sur elle. - Elle habite loin d'ici ? - Non, pas vraiment… Sa maison se trouve juste à l'orée du bois. Nous allons t'y conduire, mais nous t'attendrons dehors, tu n'auras qu'à te débrouiller pour entrer et palabrer avec elle. - J'y compte bien. Hakim et Farès me guidèrent à travers des ruelles étroites… Un vent léger agitait les feuilles des arbres et le parfum de différentes herbes aromatiques embaumait l'atmosphère. La demeure de la vieille Louisa était un peu à l'écart des autres habitations. Est-ce la voyante qui voulait vivre en retrait, ou est-ce les villageois qui l'avaient isolée ? Ce qui n'était pas évident, car d'après mes accompagnateurs, ces derniers faisaient souvent appel à cette femme pour assister des femmes en couches, préparer une mariée, réconcilier des époux ou mettre fin à des différends familiaux ou de voisinage. Je tapais deux fois à la lourde porte en bois. Une jeune femme m'accueille le sourire aux lèvres, tout en me détaillant curieusement : - Soyez la bienvenue… Que puis-je faire pour vous ma sœur ? - Heu… Je viens pour voir Nna Louisa… Je viens de la ville… - Oui… Vous n'êtes pas de notre village, cela se voit bien… Mais j'ai peur que Nna Louisa ne puisse vous recevoir… Elle ne pratique plus… - Oh ce n'est pas pour la voyance que je viens. Je… - Pas pour la voyance ? Alors entrez… Je vais la prévenir tout de suite… Vous êtes... ? - Une femme de la ville, répondis-je avec amusement, tandis que la jeune femme riait… Dites-lui seulement que je suis venue spécialement de loin pour la voir… J'aimerais discuter avec elle au sujet du village et de ses habitants. Intriguée, la jeune femme me détaille encore, avant de se décider à aller prévenir la vieille dame. Je fus tout de suite introduite dans une chambre douillette. Un tapis aux couleurs printanières était étalé sur le sol. Des matelas étaient disposés tout autour. La vieille Louisa somnolait sur une peau de mouton étalée à même le sol. II - LOUISA Elle entrouvrit les yeux et me jette un regard inquisiteur. Encore un contrôle, me dis-je. On dirait que ma venue dans ce village inspire une certaine méfiance ! Elle se relève et me tendit la main : - Bienvenue chez Louisa, jeune femme… - Merci Nna louisa, répondis-je en lui serrant la main. - Tu vois… Je connais les coutumes des grandes villes… Vous vous serrez la main comme ça pour vous saluer. - Oui… Mais généralement entre femmes, nous nous embrassons. - C'est tout comme. Elle s'assoit et m'invite à faire de même, tout en renouant le foulard en soie qui retenait ses cheveux, et qui avait glissé sur ses épaules. Elle avait des cheveux roux, teints au henné, mais dont la couleur originale, parsemée de cheveux gris, pointait aux racines. Son visage, ridé à souhait, renseignait sur son âge avancé. Mais ses yeux, vifs et malicieux, ne trompaient pas. Nna Louisa était de ce genre de femmes qui ne connaissaient pas la peur. De tout son être émanait une assurance, que même les années n'avaient pu ébranler. - Alors que puis-je faire pour toi ma fille ? - Heu… Je ne sais par quoi commencer vénérable femme. Je suis venue dans ce village dans un but précis. J'aimerais connaître tous les événements qui s'y sont déroulés et qui l'ont marqués. Tu comprends… Des choses qui sortent un peu du quotidien routinier… (À suivre) Y. H.