Au-delà des déclarations d'intention sur la nécessité de construire “un espace de solidarité, de prospérité et de stabilité” sur les deux rives de la Méditerranée, le premier sommet euro-maghrébin “5+5” de Tunis s'est achevé samedi dernier sur un bilan en demi-teinte en raison de tensions bilatérales. La cérémonie de clôture, marquée par l'absence du roi Mohammed VI du Maroc, s'est soldée par une déclaration commune en cinq points traitant de “la sécurité”, “l'intégration régionale”, “la concertation politique” et “le dialogue des cultures”. Seuls les sujets de la lutte contre l'immigration clandestine et du terrorisme international ont recueilli un consensus officiel entre les dix chefs d'Etat et de gouvernement présents à Tunis (Portugal, Espagne, France, Italie, Malte, Mauritanie, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye). Alors que la collaboration sécuritaire de l'UE avec le Maroc, l'Algérie et la Tunisie est une réalité concrète, notamment en terme de renseignement, la Libye semble encore faire cavalier seul sur cette question. Autre sujet de tension régionale que le sommet n'a pas permis de désamorcer, le lourd différend du Maroc et de l'Algérie sur le Sahara Occidental. Contrairement aux espoirs des diplomates européens, aucun contact officiel bilatéral n'a été signalé entre le roi Mohammed VI et le président algérien Adelaziz Bouteflika, déjà engagé à la difficile course à sa réélection en avril prochain. Le conflit territorial du Sahara Occidental paralyse, par ailleurs, depuis 1989 la construction de l'Union du Maghreb arabe (UMA), une structure politique moribonde qui regroupe le Maroc, l'Algérie, la Tunisie, la Mauritanie et la Libye. “Ce sommet a permis de lancer un appel fort en faveur d'une relance de la construction de l'UMA”, a estimé Jacques Chirac, tandis que Romano Prodi a appelé le Maghreb à “un sursaut politique et institutionnel indispensable pour faire progresser l'UMA”. La réponse, toujours devant un collège restreint de journalistes, de Mâammar El-Kadhafi a été : “L'UMA est à mettre au frigo”... “Il est temps de signer l'acte de décès de l'UMA qui ne pourra pas voir le jour avec certains dirigeants d'une autre époque”, analysait pour sa part un membre de la délégation marocaine qui a requis l'anonymat. Ces commentaires pessimistes sur l'intégration régionale et politique du Maghreb font planer un sérieux doute sur la possibilité, exprimée à Tunis par Abdelaziz Boutefika, d'organiser à Alger un sommet des chefs d'Etat de l'UMA “d'ici la fin de l'année”.