Pour le président de l'Apn, “les journalistes doivent s'exprimer en toute quiétude et liberté sans avoir en permanence l'épée de Damoclès au-dessus de leur tête.” “Je lance l'idée d'une loi interdisant l'emprisonnement des journalistes.” Karim Younès, président de l'Assemblée populaire nationale (APN), et auteur de cette déclaration faite lors d'un meeting du FLN qu'il a animé jeudi dernier, à la Maison de jeunes à Batna, veut visiblement prémunir les gens des médias contre les peines d'emprisonnement qui pèsent sur eux depuis l'adoption des amendements du code pénal en 2001. “Si quelqu'un se sent diffamé ou offensé, il y a d'autres moyens de recours que de penser à envoyer un journaliste en prison”, a-t-il expliqué devant un important parterre de militants de son parti tout en précisant : “Il y a la mise au point, le droit de réponse, le démenti aux écrits de presse.” Fortement applaudi par les militants du parti majoritaire dans la capitale des Aurès, Karim Younès, député FLN de Béjaïa, a martelé : “Jamais, au grand jamais, le journaliste ne doit être sujet d'une cabale pouvant l'amener en prison.” Son argument : “Les journalistes, qui sont des témoins et des vigiles de la société, doivent s'exprimer en toute quiétude et liberté sans avoir en permanence l'épée de Damoclès au-dessus de leur tête.” L'orateur soutiendra que sa proposition est en rapport avec le contexte actuel marqué par des velléités de musellement de la presse privée par le clan présidentiel et ses soutiens après la suspension, le 18 août dernier, de six titres de la presse indépendante : “Je vois ce qui se passe dans le pays et l'état psychologique du journaliste au regard de tout ce qui pèse sur lui dans l'exercice de sa profession.” Ce n'est, par ailleurs, pas la première fois que le président de l'institution législative exprime son appui à la corporation de la presse. À l'occasion de l'ouverture de la session d'automne du Parlement en septembre dernier, Karim Younès a souligné, lors de son allocution d'ouverture, “l'existence d'une presse privée ou indépendante peut paraître contraignante, parfois même exaspérante, aussi bien d'ailleurs pour les tenants d'un quelconque pouvoir central ou local que pour nous parlementaires et pour les élus de façon générale. Mais une fois démenties, expliquées ou corrigées, les situations dénoncées et rétablies, la nécessaire confiance entre gouvernants et gouvernés, entre administration et administrés, entre élus et électeurs, la société sort grandie de la médiatisation de ses tourments et l'avènement d'une presse libre dans notre pays redevient vite ce qu'il est véritablement dans la perception de tous : une conquête majeure de l'espace des libertés démocratiques en Algérie”. La proposition du président de l'APN vient, par ailleurs, remettre en cause les amendements du code pénal dans ses articles prévoyant des peines d'emprisonnement. Il est à rappeler à ce propos qu'en matière d'emprisonnement, une peine allant d'une année à trois ans de prison est prévue par l'article 144 bis en cas d'atteinte au président de la République par des propos diffamatoires, insultants ou humiliants. L'article 298 stipule, quant à lui, que, pour une diffamation dirigée à l'encontre des individus, la condamnation est d'une peine de prison allant de cinq jours à six mois. Les députés prendront-ils en charge la proposition de Karim Younès ? N. M.