Chaque année, durant le mois sacré du Ramadhan, la DAS, le Croissant-Rouge algérien, des associations caritatives, des APC et même des bénévoles tentent d'offrir un repas chaud à des centaines de jeûneurs venus de divers horizons. Outre les nécessiteux, les “zoufria", les citoyens de passage pris par la rupture du jeûne sont accueillis pour un moment de partage et de solidarité. Avec plus de 80 000 couffins distribués, soit plus de 400 000 habitants de la wilaya d'Oran qui sont confrontés à la cherté de la vie, l'opération de solidarité s'impose afin de préserver la cohésion sociale. Pour y faire face, plus de 35 restaurants Errahma ont ouvert leurs portes à travers les 9 daïras de la wilaya d'Oran. “Selon nos informations, plus de 35 restaurants ont ouvert leurs portes durant ce mois sacré. Mais, il y a aussi des familles qui accueillent des nécessiteux chez elles à l'heure du f'tour. La générosité des Algériens est sans limite", déclare un membre de l'association Irchad oua El-Islah. À raison de 200 repas par jour en moyenne par restaurant, le nombre de repas servis dépasse les 7 000. Aux deux restaurants de l'association Tileul El-Kheir, la distribution du f'tour se passe en deux phases. “Nous avons 81 familles inscrites sur notre fichier. Elles viennent chercher leur repas à partir de 17h. Le quota distribué est en fonction du nombre des membres de chaque famille. Au total, nous avons 517 repas quotidiennement distribués aux 81 familles. Ensuite, nous recevons dans nos deux restos tous les nécessiteux à l'heure du f'tour. Nous leur offrons un repas chaud dans la bonne humeur car c'est un moment de partage. Dans le premier, nous avons une moyenne de 70 repas à servir par jour et dans le second 90 repas", fait savoir Tahar, un bénévole, avant de poursuivre : “Oui, plusieurs bienfaiteurs nous fournissent des denrées alimentaires et de la viande. Pour le moment, les dons sont insuffisants, cela oblige l'association à utiliser son petit budget. Nous avons distribué 20 couffins offerts par la DAS". En fait, la journée commence tôt le matin. Les six femmes bénévoles préparent le f'tour selon le menu élaboré par l'association. L'après-midi, c'est au tour des jeunes bénévoles de l'association de prendre le relais. Pour partager ce moment de générosité et de solidarité, nous nous sommes rendus à l'un des restos de l'association à l'heure du f'tour. Il était 19h55, quand les premiers camions et voitures s'arrêtent, et se garent près de l'établissement. “Ce sont des chauffeurs de camions qui se dirigent vers Alger", nous souffle à l'oreille un jeune encadreur. Petit à petit, les chaises sont occupées. Ils sont de tous âges qui investissent les lieux. “Je suis venu dans la région d'Oran pour chercher du travail. J'ai 4 enfants. Ils sont au bled à Bordj Bou-Arréridj. El-Hamdoulillah, nous sommes bien accueillis". Les chauffeurs de camions semblaient plus à l'aise. “Le patron me donne 600 DA pour le f'tour mais comme les restaurants sont fermés, je suis venu ici", avoue l'un d'eux. Cependant, un groupe assis au fond de la salle dans un silence profond sans broncher, attire l'attention. “Ce sont des “zoufria". Ils travaillent dans les chantiers de construction de logements de la commune", fait savoir notre interlocuteur. En effet, le visage ridé, le front bronzé, les mains dures comme fer, ces ouvriers venus des quatre coins du pays, ne rentrent chez eux que tous les trois mois, voire plus, pour voir leurs familles. Ils sont maçons, ferrailleurs, peintres ou manœuvres. “J'irai à la maison la veille de l'Aïd inch'Allah", lance à voix basse, un jeune ferrailleur la vingtaine légèrement dépassée. Le repas est servi. Hors- d'œuvre, h'rira, plat de résistance avec viande, chamia et limonade. Tel est le menu quotidien pour ces dizaines de citoyens qui n'ont pas la chance de passer le carême en famille. “C'est vrai ! Les enfants me manquent", avoue ammi Ahmed, un manœuvre habitant un village de la wilaya de Chlef. Toutes les personnes sollicitées ce jour-là n'étaient pas bavardes en déclarations. Elles se sentaient humiliées par le destin, trahies par la vie, et surtout seules dans une ville qu'elles n'ont pas choisie. Une heure après le f'tour, les femmes bénévoles font la vaisselle et nettoient le resto et se préparent pour le lendemain avec son lot de pauvres gens et de déracinés qui partageront leur f'tour, leur détresse et leur solitude. À noter que le Croissant-Rouge algérien a eu beaucoup de difficultés à trouver des locaux pour ce mois sacré. D'autre part, les associations caritatives qui activent reçoivent des subventions dérisoires par rapport aux subventions allouées aux associations fictives qui nagent dans le giron des élus communaux. À titre d'exemple, l'APC d'Oued Tlélat a offert 10 millions de centimes pour l'association Tileul El-Kheir mais plus de 40 millions à l'association Adwak dont son président n'est autre que le vice-président de l'APC. À méditer. N B