La plupart des leaders politiques ont décidé de formuler des exigences politiques correspondant à leur vision de la transparence de la prochaine échéance présidentielle. C'est un fait. Une certaine unanimité semble se dégager au sein de toute la classe politique, personnalités et partis, sur la nécessité de réunir un nombre de conditions pour prendre part à l'élection présidentielle du printemps de 2004. Les représentants de tous les courants politiques veulent tous assurer leurs arrières en exigeant des garanties de la transparence de cette élection avant de s'engager dans la bataille. Autrement dit, la méfiance chez les candidats avérés ou potentiels est de mise. Certes, les conditions exigées, quoiqu'elles se recoupent parfois, ne sont pas toujours les mêmes. Mais la neutralité de l'administration et la mise à l'écart de la présente équipe gouvernementale de l'organisation du scrutin sont les revendications les mieux partagées. Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), fer de lance du courant démocratique, voit dans le départ de l'actuel gouvernement un des gages de la volonté d'organiser une élection crédible et transparente. Ce parti s'est toujours plu à présenter le trio Ouyahia-Zerhouni-Belaïz, respectivement Chef du gouvernement, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales et ministre de la Justice, comme un “état-major de la fraude”. La tête d'Ahmed Ouyahia, actuel chef de l'Exécutif, est aussi demandée par le Front de libération nationale (FLN) dont le secrétaire général, Ali Benflis, est candidat à la prochaine élection. Ce dernier est, depuis le congrès de son parti de mai dernier, en guerre ouverte avec le président Bouteflika. Il est souvent présenté comme l'un de ses rivaux les plus coriaces. Sans le dire en des termes clairs, le général à la retraite, Rachid Benyellès, qui a annoncé sa candidature, le 21 décembre dernier, semble être favorable au remplacement de l'équipe gouvernementale actuelle. Il regrette que l'armée n'ait pas “de prise sur l'Exécutif et l'administration (…)” et considère que sa neutralité “risque d'être un problème, si on laisse Bouteflika organiser les élections dans les conditions actuelles”. En politicien avisé, Taleb Ibrahimi, dont l'annonce de la candidature est imminente dit-on, fait du départ de l'Exécutif une de ses conditions pour entrer en lice. L'ex-Chef du gouvernement, Mouloud Hamrouche, fait, lui aussi, de la neutralité de l'administration une des deux conditions pour s'engager dans la bataille électorale. Etant un produit du système, Hamrouche ne peut ignorer que l'administration ne peut vraiment observer une neutralité quand on sait que l'organisateur en chef de la prochaine présidentielle, Ahmed Ouyahia, n'a pas fait mystère de son soutien à la candidature au président Bouteflika, quand les ministères qui auront à gérer cette élection sont acquis corps et âmes. Ceci dit, les différents acteurs politiques exigent d'autres conditions à même d'assurer un minimum de transparence à cette présidentielle qui se profile à l'horizon. Ainsi, le RCD de Saïd Sadi a fait valoir nombre d'exigences dont la suppression du vote dans la caserne, la révision de la loi et l'épuration des listes électorales, la sécurisation du vote de l'émigration, la présence d'observateurs étrangers “en nombre et en qualité”, etc. Pour sa part, le FLN de Ali Benflis est pour la révision de la loi électorale. Il milite pour une participation et une implication beaucoup plus soutenues des partis dans la surveillance de la régularité des élections. Tout comme il prévient à ce que le Président-candidat, qui a présentement sous sa main le gouvernement et l'administration, ne se sert de “la neutralité” affichée de l'armée, pour “détourner” la volonté populaire à son profit. Le général à la retraite, Rachid Benyellès, a, lui aussi, des appréhensions quant à la possibilité pour Bouteflika de profiter de la neutralité de l'armée. Mais l'actuelle loi électorale ne semble pas le gêner, puisqu'il la qualifie de “globalement positive”. À ses yeux, le seul problème qui se pose est comment “la faire respecter”. Outre le départ d'Ouyahia, Taleb Ibrahimi a posé deux autres conditions : la neutralité de l'armée, le départ de l'Exécutif Ouyahia et l'arrêt de l'utilisation des deniers publics au service de la campagne électorale du président Bouteflika. Se distinguant des autres acteurs politiques majeurs, le chef charismatique du FFS, Hocine Aït Ahmed, et l'ex-membre du Conseil de la Révolution, Chérif Belkacem, demandent carrément le report de l'élection et la mise en place d'une période de transition. Sans cultiver une quelconque sympathie pour le Chef du gouvernement et encore moins pour le président Bouteflika, Chérif Belkacem n'a pas cessé, depuis cinq ans, de demander d'écourter le mandat de Bouteflika. C'est dans cette perspective qu'un technocrate comme Ahmed Benbitour s'est jeté dans l'arène. C'est dire que tous les candidats déclarés ou potentiels ont une dent contre l'actuel locataire du palais d'El-Mouradia. A. C.