Selon Yazid Zerhouni, le nombre d'inscrits au fichier électoral s'élève à 17,5 millions de personnes. Un chiffre qui va relancer la polémique sur les velléités de fraude. La machine électorale s'ébranle. Après avoir annoncé, mercredi dernier, la tenue du scrutin présidentiel dans les délais, Yazid Zerhouni, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales a révélé, hier, le nombre des inscrits au fichier électoral. Selon lui, les votants potentiels sont de l'ordre de 17,5 millions. Cette annonce faite en marge de la visite du chef de l'Etat à Alger va sans aucun doute relancer la polémique sur les velléités de fraude de l'administration. En effet, une fois encore, tout se jouera sur la capacité des autorités à endiguer le spectre d'une forte abstention. Or, dans ce cas précis, les pouvoirs publics ont souvent manqué de rigueur et d'honnêteté dans la mesure où ils ont eu recours presque systématiquement au bourrage des urnes, pour masquer la défection de la population et accréditer le plébiscite préalablement choisi. 17, 5 millions d'électeurs. À coup sûr, une telle annonce va provoquer une montée au créneau des concurrents de Bouteflika à la présidence et des partis politiques. Tout le monde garde en mémoire, le grand scandale qui a entaché les élections législatives de 1997. Cette année là, d'aucuns avaient contesté la régularité du scrutin en accusant l'administration d'avoir boosté le Rassemblement national démocratique (RND), grâce à une manipulation frauduleuse du fichier électoral. Pourtant, la fameuse commission nationale de surveillance des législatives (Cnisel) installée à l'époque, devait procéder à la révision de ce fichier et s'assurer de la justesse des statistiques qu'il comporte. Manifestement, il n'en fut rien. À chaque rendez-vous électoral, les mêmes appréhensions se font jour. Pour cause, au lieu de suivre une progression linéaire, le nombre des électeurs fluctue selon le bon vouloir de l'administration. Lors des dernières élections locales en octobre 2002, Yazid Zerhouni avait avancé le chiffre de 18 millions. Face à la contestation quasi-unanime de l'opposition, il a dû revoir ses estimations à la baisse (16 millions). Pour autant, le pari de scrutins transparents et honnêtes reste une utopie. De tout temps, l'administration a été accusée de confectionner des listes additives composées d'électeurs fictifs. Quelquefois, elles constituent l'essentiel du fichier électoral. D'où, l'insistance affichée par certains partis à prendre connaissance du contenu des listes. “Ils pourront le faire si la loi le permet”, a répondu, hier, le ministre de l'intérieur en faisant allusion à la loi électorale dont les propositions d'amendements seront soumises au vote de l'assemblée populaire nationale. Initiateur des principales modifications, le parti El-Islah de Abdallah Djaballah demande entre autres, la révision régulière du corps électoral et la publication de son contenu. Aux yeux de cette formation, cet amendement comme ceux relatifs d'ailleurs au contrôle des élections et à la supression du vote dans les bureaux spéciaux, constitue une garantie et augmente les possibilités de recours. Légalement, il faut savoir que les communes doivent annuellement procéder à la révision des fichiers et, à titre exeptionnel, à la convocation du corps électoral. Or, elles ne le font pas. Il est à se demander alors, en vertu de quelle opération comptable, le ministre de l'intérieur a établi une liste de plus de 17 millions d'électeurs. Cette question mérite d'être posée, d'autant qu'il a affirmé lors de son audition par la commission juridique de l'APN que la révision du fichier n'a pas encore eu lieu. Au cours de cette rencontre, Zerhouni avait même admis que le corps électoral “n'est pas conforme à la réalité”. En toute logique, il doit représenter 40% de la population. Chez nous, il représente plus de la majorité. S. L.