Si ce gouvernement reste en place, il fera de l'élection présidentielle ce qu'il voudrait qu'elle soit, un scrutin dont la fraude sera la caractéristique principale, un plébiscite de routine pour Abdelaziz Bouteflika. Le chiffre avancé par Yazid Zerhouni, censé informer l'opinion publique en général et les acteurs politiques en particulier sur la taille du corps électoral appelé à se rendre aux urnes le printemps prochain, aura juste suffi à faire naître une polémique. Le chiffre est récusé de toutes parts et ceux qui le qualifient de mensonger ne manquent pas d'arguments. Comment en manqueraient-ils alors qu'ils peuvent en trouver de plus irréfutables seulement en relevant ces innombrables incohérences et incongruités qui marquent l'évolution du fichier électoral ces dix dernières années ? Les taux de natalité et de mortalité, les migrations et les changements de résidence pourraient être manipulés à souhait qu'ils n'expliqueraient pas une telle évolution du corps électoral. Mais le chiffre de Zerhouni ne doit sûrement pas être apprécié pour ce qu'il est à première vue, un mensonge qui vient à la suite de bien d'autres. Il doit être entendu comme un message : si ce gouvernement reste en place, il fera de l'élection présidentielle ce qu'il voudrait qu'elle soit, un scrutin dont la fraude sera la caractéristique principale, un plébiscite de routine pour Abdelaziz Bouteflika. On peut donc penser que Yazid Zerhouni vient de provoquer sciemment une polémique autour du corps électoral et du vote des corps constitués pour éviter que s'enclenche un débat sur l'opportunité du maintien de l'actuel Exécutif dirigé par un chef de parti engagé, avec armes et bagages, derrière le Président-candidat. Plus qu'un mensonge, plus qu'un message, le chiffre de Yazid Zerhouni ne serait alors qu'une diversion, une de plus, voire de trop. Il semble constituer, en même temps, une parade : des candidats, bien que non officiellement déclarés, ont déjà émis le souhait de voir le gouvernement Ouyahia céder la place à un staff neutre. Certains ont même appelé l'Armée, plus ou moins ouvertement, à se départir de sa neutralité. Ceux-là ont conscience que cette neutralité n'a de sens que si elle est aussi le fait de la justice et de l'administration. On en est loin et Yazid Zerhouni saisirait volontiers l'aubaine pour “faire voter” autant d'électeurs qu'il faudra pour un second mandat pour Bouteflika. S. C.