C'est incroyable comme le marché du mouton aura connu cette année un engouement populaire sans précédent dans la wilaya de Tizi Ouzou. Et pour cause, les souks hebdomadaires de Kabylie connaissent, depuis quelques jours déjà, une effervescence exceptionnelle alors que les marchés improvisés et occasionnels auront atteint des proportions incroyables aux quatre coins de la wilaya de Tizi Ouzou. Sur toutes les routes de Kabylie, qu'elles soient routes nationales, chemins de wilaya ou de commune, les attroupements sont perceptibles depuis quelques jours et se sont multipliés depuis le week-end en raison de la forte demande constatée à quelques jours de la fête tant attendue. Tradition oblige, les montagnards et les paysans de Kabylie s'affairent à liquider les troupeaux engraissés à longueur d'année dans les nombreux pâturages de la région ou dans les jardins familiaux alors que les éleveurs et surtout les maquignons occupent très souvent la chaussée et les cours d'immeuble pour monter les enchères et écouler au mieux leur cheptel. Les camions à bestiaux immatriculés dans de nombreuses wilayas à vocation pastorale telles que Djelfa, M'sila et Bouira sillonnent de plus en plus les routes de Kabylie transportant des ovins à n'en plus finir ou encore des quantités de bottes de foin considérables tant l'aliment du bétail est un commerce très juteux en cette période qui précède la fête du sacrifice. “Les prix sont inabordables cette année et cela fait quelques jours déjà que je sillonne les souks de la région pour trouver un mouton à la portée de ma bourse, mais en vain", nous dira un père de famille rencontré à Draâ Ben-Khedda, une localité où se dénichent généralement les belles affaires de l'Aïd. À Tala Athmane, autre localité prisée pour l'achat et la vente des bestiaux, un fonctionnaire fait grise mine. Il dresse un constat très judicieux sur la flambée des prix qui frappe cette année le marché du mouton. “Avec tous les rappels de salaires encaissés cette année par les travailleurs, et surtout les enseignants et les fonctionnaires, il y a trop d'argent sur le marché et les maquignons en profitent largement pour se sucrer sur le dos des citoyens car de nombreux clients, sûrement excédés par la flambée des prix et le va-et-vient incessant dans les marchés de la région, finissent par craquer et achètent leur mouton à n'importe quel prix, la barre des 50 000 DA étant très souvent dépassée pour acquérir un mouton tout juste moyen. Le comble, c'est que nous avons habitué nos enfants à l'achat du mouton de l'Aïd, sinon j'aurais bien voulu faire l'impasse sur ce véritable sacrifice au sens le plus large du terme", dira-t-il avec une grosse moue qui en dit long sur sa déception et son désarroi, lui qui s'apprête à rentrer encore bredouille à la maison en attendant de dénicher une belle proie ou céder à la surenchère avant ce week-end de fête. Sacrifice pour sacrifice, de nombreux citoyens optent depuis quelques années pour l'achat et le sacrifice collectifs de taurillons, une formule qui est encore d'actualité cette année. “Cela fait trois ans que nous nous associons à sept ou huit amis pour acheter un veau et le sacrifier dans la bonne humeur tout en partageant de bonnes parts de viande, de tripes et de bouzellouf pour chaque famille et le tour est joué", nous a révélé avec un air de satisfaction et surtout de délivrance un postier de Tizi Ouzou tout en se frottant les mains pour avoir solutionné son problème sans trop de tracas. M H