Résumé : À la rédaction, une pile de courrier m'attendait. Des réclamations, des critiques, des propositions. Je ne risquais pas de chômer, mais à quel prix ! Je repense à Youcef et à mon fils. La sonnerie du téléphone me tire de mes méditations. C'était la présidente des femmes en difficulté. Je me demande si mes neurones peuvent supporter autant de charges ! Je suis lancée dans ma rédaction. Cela devient certes routinier, mais tout de même, il faut toujours relire ce qu'on écrit pour éviter les coquilles et mettre à l'aise le lecteur. Il faisait nuit lorsque je remets mon papier. Ma rubrique comportait comme menu un exposé sur la femme victime de harcèlement sous toutes ses formes, un communiqué sur la manifestation qui se préparait, et puis les récits émouvants de Kenza et Houria. Mes collaboratrices avaient rajouté leur grain de sel, en me proposant une nouvelle interview avec les femmes victimes de leurs ambitions. Un peu mon cas, me dis-je en relisant l'entretien. C'était déjà l'heure du bouclage. Je prends mes affaires et quitte la rédaction. Rien ne me retiendra ce soir, ni le déluge, ni le tsunami, ni le tremblement de terre. Je suis avant tout une femme, une épouse et une mère ! Youcef n'était pas encore rentré. Je m'empresse de libérer la nurse. Mehdi dormait comme un ange. Je me dirige alors vers la cuisine pour préparer le dîner. Je n'ai pas cuisiné il y a des lustres, il me semble. À peine avais-je déposé ma marmite sur le feu que Mehdi se réveille. Je cours le prendre dans mes bras. Il fut heureux de me voir, et me met ses bras autour du cou : - Mama, Ma... Ma... - Oui, mon ange, maman est là. Il souriait de toutes ses petites dents, et les fossettes creusèrent ses joues, tandis que des boucles de cheveux bruns collaient à son front. Je me mets à jouer un moment avec lui, puis je lui donne son biberon. Je me rappelle tout à coup des cadeaux d'anniversaire que j'avais achetés, et de tous les paquets qu'on n'avait pas ouverts la veille et qui trônaient encore sur la table du salon. Je courus les chercher et me mis à les ouvrir un à un devant mon fils. Des cris de joie accueillaient chaque paquet, Mehdi avait compris que tous les jouets étaient pour lui et ses yeux brillèrent de bonheur. Il se met à taper des mains et à babiller. Mon bonheur, ma vie, mon avenir, tout était là... Le bruit de la porte d'entrée me tire de mes méditations. Youcef nous rejoint dans la cuisine. À la vue des paquets et des papiers d'emballage jetés çà et là, il sourit : - On dirait que tu reviens à de meilleurs sentiments envers ton fils. Je relève la tête brusquement. La remarque était plus qu'un coup de couteau dans mon cœur : - Je n'ai jamais oublié mon fils, je l'ai toujours adoré. - Oui, mais quelquefois tu as tendance à l'ignorer. - Jamais ! Youcef me prend dans ses bras : - Ne crie donc pas autant. Je suis là, tu es là et notre fils est là. Que veux-tu de plus ma chérie ? Je me dégage de lui : - Je veux que tu retires ce que tu viens de dire. - Je retire ce que je viens de dire, à condition que tu ne fasses plus faux bond, comme pour hier. - Tu sais très bien que... Il s'approche de moi et mets un doigt sur ma bouche : - Chut, ne dis plus rien... Il se met à humer les odeurs qui embaumaient la cuisine : - Hum, je crois que je ferais honneur au dîner de ce soir, cela sent tellement bon. Mehdi se remet à babiller et nous revenons tous les deux vers lui : - Regarde ce que t'a acheté maman. - Vois ce que je t'ai acheté mon chou, renchérit Youcef. Mehdi regarde ses jouets, puis se met à pleurer. Youcef le soulève dans ses bras : -Tu es fatigué, maman ne t'a pas changé ? -Il vient juste de prendre son lait. - Alors je vais le changer. - Non, laisse. C'est à moi de le faire. (À suivre) Y. H.