Un véritable bras de fer s'est instauré entre réformateurs et conservateurs après la présentation hier par plusieurs ministres et vice-présidents iraniens de leur démission, qu'ils confirmeront définitivement si le Conseil des gardiens de la constitution ne revient pas sur le rejet massif des candidatures aux législatives. “Un certain nombre de ministres et vice-présidents ont démissionné. Il est naturel qu'ils attendent le résultat du travail” accompli par le Conseil des gardiens pour confirmer leur décision, a dit M. Abtahi, qui, selon la presse, compte lui-même au nombre des démissionnaires, à sa sortie du conseil des ministres. Les commissions de surveillance des élections relevant du Conseil des gardiens, institution clé contrôlée par les conservateurs, ont invalidé plus de 3 600 des 8 157 candidatures aux législatives du 20 février, dont celles de 80 députés réformateurs sortants. Les commissions ont invoqué le non-respect de l'islam et de la Constitution par les candidats. Ce rejet, dénoncé par les réformateurs comme une tentative de “coup d'Etat” des conservateurs, a provoqué une des plus graves crises politiques intérieures de la République islamique. Le 14 janvier, le président Mohammad Khatami avait brandi la menace d'une démission collective des réformateurs, qui tiennent actuellement la présidence, le gouvernement, le parlement et les sièges de gouverneurs de province, alors que les conservateurs ont la haute main sur des instruments du pouvoir comme le Conseil des gardiens, la justice ou encore le Conseil de discernement, instance suprême d'arbitrage politique. Les gouverneurs ont eux aussi menacé de démissionner. “Les gouverneurs, les ministres et les vice-présidents sont très déterminés, et j'espère que les instructions données par le guide suprême créeront un climat plus favorable à des élections libres et à une participation plus élevée”, a dit M. Abtahi devant la presse. Devant l'ampleur de la crise, le guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, a ordonné au Conseil des gardiens, un organe conservateur, de réexaminer avec moins de sévérité les candidatures. Selon M. Abtahi, les instructions du Guide sont à même de “sortir le pays de la crise”. “L'une des choses dites par le Guide, c'est que les députés sortants ou ceux dont une candidature a déjà été avalisée par le passé doivent pouvoir se présenter à nouveau", a souligné le vice-président, "cela représente 360 personnes. C'est facile à appliquer, mais pour l'instant nous n'avons rien vu". Même si le Conseil des gardiens, composé de religieux désignés par le Guide et de juristes, rectifie le tir, M. Abati s'est inquiété du peu de temps laissé aux candidats, “alors que beaucoup de candidats conservateurs ont déjà lancé leur campagne officielle”.