Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a “écouté" le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, à Ramallah. Il aurait pu s'en dispenser, le président Obama ayant fait la même chose il y a moins d'un mois. Venant de Turquie, l'"ancien" du Vietnam avait averti par avance qu'il n'apportait aucun plan de paix dans ses bagages. Au fond, l'envoyé du président américain a fait le déplacement surtout pour presser à Istanbul le gouvernement turc à accélérer la normalisation des relations de ce pays-clé de l'Otan avec Israël. Pour appâter le Premier ministre turc, dont l'histoire a retenu qu'il a dit clairement et vertement ses quatre vérités en live au président israélien, à Davos, le Forum des «maîtres» du nouveau monde, John Kerry a proposé aux Turcs de jouer un “rôle-clé" dans la relance du processus de paix au Moyen et Proche-Orient. “La Turquie peut de nombreuses façons jouer un rôle-clé, apporter une importante contribution au processus de paix (...). Un pays aussi dynamique et énergique que la Turquie peut avoir un impact profond sur le processus de paix", a-t-il plaidé devant ses interlocuteurs à Ankara, avant de regagner Jérusalem et Ramallah où il est resté muet, du moins en termes de propositions. Mais, même cette nouveauté d'introduire la Turquie dans une éventuelle reprise du dialogue israélo-palestinien a été rejetée par Israël. La ministre israélienne de la Justice Tzipi Livni, chargée du dossier des négociations avec les Palestiniens, a exclu que la Turquie joue un rôle actif dans la relance du dialogue entre Israéliens et Palestiniens. “Le processus politique doit se dérouler de façon directe entre nous et les Palestiniens", a dit Mme Livni. Netanyahu, qui entend rester maître des négociations, a fait savoir au représentant d'Obama que ne seront impliqués que les pays qui partagent ses desseins et objectifs et que, pour le moment, ses efforts visent à la reprise des négociations directes, à ses propres conditions. John Kerry a dit que les Américains tentent d'aider à cette relance. La messe a été redite pour tous ceux qui espéraient un ressaisissement de la part de Washington qui espère faire bouger les lignes en acquérant l'entrée du gouvernement islamiste dans les négociations entre Israéliens et Palestiniens. N'est-ce pas sous la pression des Etats-Unis, à la fin de la visite historique du président Barack Obama en Israël, que Netanyahu a présenté le 22 mars les excuses de son pays pour la mort de neuf ressortissants turcs, tués par l'armée israélienne lors de l'assaut en 2010 d'une flottille humanitaire en route pour Gaza. Ce geste a relancé les relations entre les deux pays, suspendues de fait depuis cet incident, Israël devant verser des dommages et intérêts aux familles des victimes turques. Kerry a souhaité le retour rapide d'ambassadeurs dans les deux pays. “J'ai confiance en la bonne volonté des deux parties", a-t-il affirmé au Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, qui avait accepté les excuses d'Israël “au nom du peuple turc", en prévenant que la qualité de la relation entre les deux pays dépendrait largement de l'attitude d'Israël à Gaza dont il réclame la levée du blocus israélien. Erdogan, leader également de l'AKP, le parti islamiste au pouvoir, a annoncé qu'il envisageait d'ici à fin avril une visite dans les Territoires palestiniens, y compris à Gaza. De la visite éclair de Kerry à Ramallah, il ressort encore que les Etats-Unis ne sont intéressés que par les liens américano-israéliens, non sur l'occupation de la Palestine. Les Palestiniens sont aujourd'hui convaincus de l'hypocrisie d'Obama qui soutient les colons juifs, en complète violation du droit international, alors qu'eux se voient empêchés de développer leurs propres terres dans ce qui est maintenant considéré par la plupart des pays comme l'Etat palestinien. Le message implicite de la tournée de Kerry après la visite d'Obama, c'est que le gouvernement Netanyahu est libre de faire ce qu'il veut, avec peu de danger, rien de plus qu'une protestation symbolique de Washington. D. B Nom Adresse email