Liberté : Vous ne voulez pas entendre parler d'une révision de la Constitution avant la présidentielle de 2014. Pourquoi ? Djillali Sofiane : L'amendement de la Constitution n'a de sens que si elle est liée à la présidentielle. Le président actuel, par l'amendement de la Constitution, s'aménage la possibilité de désigner lui-même son successeur par un tour de passe-passe en créant un poste de vice-président. L'Algérie a besoin aujourd'hui d'un président qui assume toutes ses responsabilités et qui doit mériter son salaire et non pas d'un proconsul nommé par un empereur pour gérer le pays. La Constitution a besoin d'une refonte profonde mais ce chantier doit être mené par un président nouvellement élu, légitime et en pleine possession de ses capacités politiques pour ouvrir un vrai débat national. J'ai bien peur que la commission qui vient d'être installée ne soit qu'un artifice pour faire croire à l'opinion qu'il y a une vraie réforme de l'Etat. Mais dans les faits, l'objectif est de pérenniser le pouvoir de Bouteflika. Voilà pourquoi nous rejetons aussi bien le 4e mandat que la révision de la Constitution. Vous vous êtes farouchement opposé à un quatrième mandat de Bouteflika alors que la Constitution actuelle le lui permet. On peut avoir une explication ? Ceux qui disent que la Constitution actuelle autorise le Président à se présenter à un 4e mandat se réfugient derrière la forme légaliste mais confirment la violation de la Constitution en 2008. La dernière révision constitutionnelle n'est pas légale dans les formes. Il y a eu atteinte aux équilibres du pouvoir sans que le projet ne soit soumis à référendum alors que la Constitution est très claire à ce sujet. Le diction dit : “Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude". M. Bouteflika a légalisé ce qui était illégal et donc un 4e mandat est moralement condamnable. Par ailleurs, le bilan politique, économique, social et culturel est désastreux après 14 ans de règne. On a l'impression qu'il n'y a pas eu un projet de société mais plutôt un projet de destruction de société. Le pays ne peut plus souffrir plus longtemps cette situation. Un changement profond est absolument nécessaire et vital. S'il n'est pas organisé avec la participation de tous y compris le Président actuel, alors il s'imposera par une regrettable violence au détriment de toute la nation. Des exemples vivants sont multiples et en voyant comment Kadhafi et Bachar al-Assad, par leur obstination à rester au pouvoir, ont causé tant de malheurs à leurs pays. La persistance de Bouteflika à rester au pouvoir équivaut à une nuisance croissante pour le pays. Comment voyez-vous la présidentielle d'avril 2014 ? La première étape est de savoir ce que fera le Président actuel. S'il persiste à briguer un 4e mandat, il entraînera le pays dans la tourmente. Si la sagesse prime, au contraire l'Algérie verra fleurir de nouvelles capacités politiques qui s'attelleront à construire l'avenir. Car s'il se représente, il est évident que le scrutin ne sera ni honnête ni transparent ni loyal. Il va trafiquer. Le renoncement de Bouteflika est une condition nécessaire mais pas suffisante pour sortir le pays de la crise multidimensionnelle. Mais toute solution passe inévitablement par le départ du Président actuel. Sofiane Djillali sera-t-il candidat ? Actuellement, j'ai la charge de président d'un parti qui a ses instances qui fonctionnent de manière démocratique. Pour nous, l'important est de lier l'intérêt de Jil Djadid à l'intérêt supérieur de la nation. Le conseil national a ouvert le dossier de la présidentielle dans sa session d'avril et il ne le fermera qu'à l'automne pour prendre la décision qu'il juge la meilleure. Nom Adresse email