Aux yeux du chef de l'Exécutif, les appréhensions des candidats participent beaucoup plus d'un manque de confiance et procèdent d'un procès d'intention. Ahmed Ouyahia a, finalement, concédé à répondre au groupe des “onze” dont le départ du gouvernement constitue l'une de leurs principales revendications pour la tenue d'un scrutin transparent. Dans un entretien accordé au quotidien français du soir Le Monde et publié dans sa livraison d'hier, au lendemain de la seconde sortie du “front contre la fraude”, le chef de l'Exécutif a clairement signifié qu'il n'a pas l'intention de démissionner de son poste. “Ils sont libres de dire ce qu'ils veulent. Sachez que je n'ai pas l'intention de présenter ma démission. D'autant que lorsqu'il y a moins de dix mois, j'ai exposé mon programme de politique générale, il comportait l'organisation d'une élection présidentielle libre, transparente et loyale”, a expliqué Ahmed Ouyahia. Aux yeux du chef de l'Exécutif, les appréhensions des candidats participent beaucoup plus d'un manque de confiance et procèdent d'un procès d'intention que de l'absence de garanties pour la tenue d'un scrutin libre et transparent. Mieux, Ahmed Ouyahia soutient que toutes les conditions sont réunies — “on ne peut pas faire mieux”, dit-il —, mais suggère en filigrane, comme Zerhouni, que si fraude il y a, elle sera l'œuvre de formations politiques. “Lundi 19 janvier, la majorité des députés de l'Assemblée ont voté une révision de la loi électorale, qui complète des instructions présidentielles déjà existantes. Toutes les conditions sont donc réunies pour une élection présidentielle transparente : la surveillance des bureaux de vote par les représentants des candidats, leur présence au dépouillement, le droit d'obtenir une copie du procès-verbal du plus petit des bureaux de vote, la communication des listes électorales, la disparition – bienvenue — des bureaux spéciaux dans les casernes et les postes de police. On ne peut pas faire mieux. Mais il faut que toutes les parties jouent le jeu : l'administration, qui s'engage à veiller au respect de la loi et à la transparence du scrutin, et les candidats. Or, il y a un manque de confiance ancien. Certains partent à la bataille avec la conviction que les dés sont pipés, peut-être parce que le pluralisme démocratique est une notion récente pour nous. La nouvelle loi accorde des garanties supplémentaires. Que l'on ne nous fasse pas de procès d'intention. Une élection truquée ne servirait ni le candidat élu ni le pays”, a-t-il dit. À contre-courant de l'opinion nationale et des candidats, le chef de l'Exécutif soutient même que “l'unique” est ouverte à toutes les sensibilités. “Je n'ai donné aucune instruction à la télévision. Y a-t-il un seul parti politique qui ait été privé de couverture médiatique ? Qu'on m'en apporte la preuve. Nous ne sommes pas encore en campagne électorale et pourtant des responsables de parti tiennent des réunions, organisent des rencontres. La télévision couvre leurs activités, sans traitement de faveur. Et lorsque la campagne électorale sera lancée, tous les candidats seront logés à la même enseigne”, a-t-il affirmé. Interrogé sur la récente sortie du patron de l'institution militaire, Ahmed Ouyahia, qui s'est refusé à “en faire la lecture”, a rappelé toutefois qu'il est “fier de l'armée” et qu'il appartient aux politiques de faire en sorte que les compétitions électorales se déroulent normalement, sans atteinte l'ordre public. “Cessons de considérer que l'armée est un arbitre. S'il y a une crise politique, il y a un Parlement. Il peut démettre le chef de l'Etat. Pour le reste, nous avons des élections. C'est au peuple de trancher”, a-t-il dit. Sur les harcèlements contre la presse, Ahmed Ouyahia qui rappelle qu'il a été “l'artisan de la libéralisation du code pénal sur les questions de presse” soutient “qu'il a toujours poussé la presse à critiquer le président de la République et le gouvernement”. Mais, ajoute-t-il, “je leur ai dit aussi : n'insultez pas”. Il invite ainsi la presse à mettre en place son code de déontologie. Enfin, à la question sur son absence de la course au fauteuil présidentiel, Ahmed Ouyahia a estimé qu'il y a trop de candidats. “Je pense que je sers mieux ce pays au poste qui est le mien qu'en participant à cette galopade”, a-t-il conclu. K. K.