La pénurie de médicaments et le manque de prise en charge des cancéreux sont loin d'être les seules pathologies qui freinent l'évolution du secteur de la santé. L'accumulation de multiples autres lacunes, pas connues du simple citoyen, semble être plus dévastatrice. Les travaux du Forum hospitalier, qui a ouvert hier sa première édition annuelle à l'hôtel Mercure, auront été une belle opportunité pour faire un état des lieux du secteur de la santé. Ce n'était pas le thème central du forum animé par Ahmed Lahri, mais il est quasi impossible d'aborder un quelconque sujet relevant de la santé sans s'arrêter longuement sur la situation de déliquescence avancée dont souffrent les professionnels et les malades. Le diagnostic n'est pas nouveau mais est confirmé à chaque manifestation scientifique ou médicale. Les différents professionnels du secteur de la santé qui ont pris part hier au forum n'ont pas pris de gants pour mettre le doigt sur les véritables lacunes du secteur. Des lacunes et des insuffisances autres que les traditionnelles pénuries de médicaments, surcharge des hôpitaux, manque de prise en charge des cancéreux... L'assistance a, en fait, eu droit à un autre constat, certes pas des plus reluisants, mais qui fait remonter en surface une autre catégorie ou série de problèmes qui freinent l'évolution du secteur de la santé. Autrement dit, quand la parole est donnée à différents intervenants et responsables, des vérités jusque-là dissimulées éclatent au grand jour. L'on se rend compte que les problèmes du secteur sont multiples et énormes. Faut-il lancer un centre de réflexion pour faire un état des lieux du secteur ? interroge l'animateur. Cet état sera vite fait par les différents participants aux débats sur "le praticien et l'hôpital". Pour le professeur Grangaud, "le secteur de la santé en Algérie se caractérise par deux faits. Le premier, c'est l'éclatement entre les différentes structures. Il n'y a pas de communication entre les structures. Le deuxième a trait à la non-définition des tâches ou des missions de chaque corps". Pourtant, il fut un temps où le pays se souciait réellement du développement du secteur de la santé. L'intervenant se rappellera qu'entre 1974 et 1978, le ministère de la Santé a sollicité l'OMS pour des formations en pédagogie médicale et des programmes ont été modifiés, puis en 1980 pour des formations sur les tâches des médecins généralistes. "Il y a triomphe de l'archaïsme !" résume le docteur Hamlaoui de Parnet. Et de faire remarquer qu'il n'y a pas que le cancer en Algérie. Il y a d'autres problèmes réels qui ne touchent pas spécialement le malade. Et ce n'est pas en créant de nouvelles structures ou CHU qu'ils seront résolus. Nous avons déjà 12 qui bouffent 80% du budget du secteur. Ce qu'il faut c'est travailler en réseau. Les maladies rares constituent aussi un énorme problème, mais selon le professeur Grangaud, "rien n'est prévu" dans le sens de la prise en charge de ces maladies. "Il y a quelques années, un ministre nous a accordé 30 milliards de dinars pour ces maladies. Des découvertes ont été faites, 13 au CHU Mustapha-Pacha. 30 millions par an est le coût d'un seul malade. Mais depuis plus rien", confie un médecin du CHU Mustapha. Et de regretter le fait d'avoir ouvert une porte pour ces malades et de la refermer aussitôt. Intervenant lors des débats, le DG du CHU de Béni Messous dira que le problème de la santé ne relève pas uniquement du département de tutelle. "Que font les walis et les directeurs de santé pour booster le secteur dans leurs régions ?" s'interroge-t-il. Les participants évoqueront, à ce propos, le manque de spécialités dans l'intérieur du pays notamment au Sud. Les médecins n'exercent dans certaines régions que dans le cadre du service civil. Et là, encore, il y a beaucoup à dire. Les pharmaciens hospitaliers réclament leur statut Au centre des débats de la matinée, la mission du pharmacien hospitalier est l'un des problèmes auquel est confronté le secteur. Théoriquement, le pharmacien hospitalier est formé pour répondre aux besoins de l'hôpital dans sa spécialité. Mais une fois en poste, bien d'autres tâches viennent se greffer à son activité initiale, à savoir "la gestion de tout ce qui est lié au médicament au sein de l'hôpital. Les appels d'offres, la traçabilité du médicament, les négociations..." En un mot, sur le terrain, la mission du pharmacien hospitalier a évolué et s'est multipliée, mais sans que son "rôle incontournable" lui ouvre droit à un statut. Les différents intervenants étaient unanimes à réclamer un statut qui définirait clairement les missions du pharmacien de l'hôpital en vue de situer ses responsabilités et de le sécuriser via des textes de loi. Ils ont également mis l'accent sur la formation pour être capables de bien remplir les tâches supplémentaires à leur mission initiale. M B Nom Adresse email