Rabat est dans l'attente du retour de Mohammed VI, en convalescence en France où il aurait subi une opération. Paralysé par une crise gouvernementale, le pays est en stand-by. Le Maroc est toujours en prise à une crise gouvernementale. Pour trancher entre un simple remaniement ou des élections anticipées, le chef du gouvernement attend le retour de Mohammed VI, en convalescence dans une de ses propriétés en France. En outre, un mois après avoir annoncé son retrait du gouvernement, le principal allié des islamistes, le parti historique l'Istiqlal, n'a toujours pas mis sa décision à exécution, affirmant lui aussi attendre l'arbitrage du roi. Toléré dans l'opposition par Mohammed VI après la mort de son père, Hassan II, le parti islamiste Justice et développement (PJD) a cueilli la mise lors des législatives de fin 2011, dans le sillage des "printemps arabes". Faute de majorité, son chef Abdelilah Benkirane devait toutefois se contenter d'une coalition hétéroclite avec trois autres formations, dont l'Istiqlal, le parti de l'indépendance. Le 11 mai, ce dernier décidait de mettre un terme à la coalition, découvrant sur le tard les velléités du PJD d'appliquer sa propre idéologie, l'islam dans sa rigueur pour la société et le libéralisme de bazar en matière économique. Selon la Constitution, adoptée également dans le sillage des révoltes arabes, deux voies se présentaient au Maroc : ou Benkirane procède à un remaniement pour remplacer les cinq ministres de l'Istiqlal démissionnaires, ou il présente sa démission au roi qui convoque des législatives anticipées. La décision du numéro un de l'Istiqlal, dirigé par le maire de Fès, Hamid Chabat, a été remise en cause par le roi, qui a demandé à l'Istiqlal de surseoir à sa démission dans l'attente d'une solution qu'il soumettra en personne au gouvernement. Chabat a reçu les instructions du roi par téléphone, celui-ci se trouvant en France pour soins puis pour convalescence, selon le porte-parole de l'Istiqlal, Adil Benhamza. C'était en avril dernier et, depuis, c'est le statu quo. Voilà plus d'un mois que le suspense dure, et l'Istiqlal fait patienter ses députés et militants en affirmant en boucle que le retour de Mohammed VI "est imminent". En attendant, c'est tout le pays qui est en stand-by. Les ministères et la haute administration sont paralysés, alors que Mohammed VI avait assuré, en novembre 2011, que son pays fonctionnait dorénavant selon les normes de bonne gouvernance, de démocratie et du jeu institutionnel. En l'absence d'informations officielles, la presse marocaine se perd en spéculations, tandis que les sujets de Mohammed VI s'interrogent sur la santé de ce dernier. Autre sujet de grande inquiétude chez le PJD : le Makhzen préparerait des salafistes à participer au jeu politique ! Benkirane, qui a rêvé de constituer le modèle dans le Maghreb, est d'autant plus inquiet que les salafistes d'Ennahda wal Fadila de Mohammed Khalidi viennent d'opérer une OPA sur une aile dissidente du PJD, le propre parti de Benkirane. La formation n'a aucun représentant au Parlement, mais on ne parle à Rabat que de sa montée en puissance face à un PJD accusé de n'avoir pas fait grand-chose et dont les cadres sont accusés d'être entrés dans le moule du Makhzen, notamment dans ses privilèges et sa proximité avec le Palais royal. Libérées par le roi en février 2012, les trois têtes d'affiche du salafisme marocain, Abou Hafs, Hassan Kettani et Omar Haddouch, auraient eu toutes les facilités pour faire monter la maillonnaise salafiste dans les terrains de chasse du PJD, y compris chez la nouvelle bourgeoisie baraziste et piétiste. Les salafistes qui avaient voté massivement pour le PJD en novembre 2011 ne le feront plus. Eux aussi cherchent leur place sur l'échiquier politique marocain. Mohammed VI joue avec le feu, car les salafistes sont tout aussi dangereux que les autres versions de l'islamisme. Il est à se demander si le Qatar et l'Arabie saoudite, les commanditaires du salafisme, ne sont pas pour quelque chose dans les encouragements du Palais royal ? D. B Nom Adresse email