Dix bâtonniers, réunis vendredi à l'hôtel Hilton, demandent le report du vote du projet de loi portant profession d'avocat jusqu'à "l'élargissement et l'approfondissement du débat" avec les parlementaires. Cette doléance a été transmise au ministère de la Justice et au gouvernement. C'est ce qu'a annoncé le bâtonnier d'Alger, Abdelmadjid Sellini, lors de la conférence de presse qu'il a animée, hier, au tribunal d'Alger. Un rassemblement organisé lundi au siège de chaque conseil de l'Ordre des avocats a été également retenu par les bâtonniers en conclave. Il faut savoir que la réunion de vendredi, qui devait être un conseil de l'Union nationale des barreaux d'Algérie, s'est tenue en l'absence du bâtonnier national qui a refusé de cautionner toute démarche de contestation, sous prétexte qu'il a reçu des assurances pour le respect de la mouture du texte de loi validé par son organisation. À la question de savoir si la défection du président de l'Union nationale des barreaux d'Algérie ne diminue pas de la portée de ces décisions, le bâtonnier d'Alger réplique que "l'Union nationale des barreaux d'Algérie est une instance collégiale. Le président de l'union n'est qu'un porte-parole et a exactement la même voix que n'importe quel bâtonnier. Nous étions dix et donc il doit se plier à la majorité". Après une longue dissertation sur l'importance du respect des droits de la défense, Me Sellini lâche : "On nous a trahis." La corporation a été trahie par qui ? Le ministère de la Justice, la commission des affaires juridiques de l'Assemblée nationale ou le bâtonnier national ? Sellini s'abstient de situer les responsabilités. Il se contente de dire : "Après notre rejet de la mouture de Belaïz et la mobilisation qui a suivi, nous avons tenu plusieurs séances de travail avec le ministère de la Justice qui ont abouti à un accord sur une version acceptable par les avocats. Le gouvernement a promis de respecter cet engagement. La commission des affaires juridiques de l'APN, qui nous a reçus, nous a également rassurés. Mais nous avons été surpris par la présentation d'une mouture complètement différente à la plénière." Selon lui, une quarantaine d'articles "ont été touchés dans le sens de la marginalisation et la fragilisation de l'avocat et le non-respect des droits de la défense. Ce statut met l'avocat sous la botte du ministère de la Justice". Il pense qu'on aurait pu faire l'économie d'une nouvelle loi, si c'est pour réduire les droits consacrés par l'ancienne. "L'actuel texte ne nécessitait pas une révision totale, mais juste quelques amendements concernant le mandat du bâtonnier ou la création d'une école d'avocats par exemple. Aujourd'hui, on assiste à une régression des droits de la défense. On était un exemple et maintenant on va être la risée des avocats des autres pays." Divisée sur presque tout. Sur la nécessité de déclencher une protestation ou pas. Sur les moyens à mettre en œuvre pour se faire entendre, la corporation des avocats est divisée. La décision prise par le conseil de l'Ordre des avocats d'Alger d'organiser une marche ce matin de la rue Abane-Ramdane à l'Assemblée nationale a été finalement annulée parce que non suivie par les neuf autres bâtonnats qui s'inscrivent pourtant dans la démarche du rejet de la nouvelle version du projet de loi portant profession d'avocat. Dans le cas où ce texte serait voté, le 2 juillet prochain, une assemblée générale du conseil de l'Ordre des avocats d'Alger sera convoquée pour arrêter les démarches à suivre, affirme Me Sellini. Le scénario le plus plausible serait l'organisation d'un ou plusieurs mouvements de grève à la rentrée sociale. N H Nom Adresse email