L'auteur, à travers des poèmes courts et lourds de sens pour la plupart, parle de l'écriture, de la persévérance, du dialogue infécond, de la jalousie, de la solitude, de l'amnésie et du masochisme. Les chants de l'homme est le titre du nouveau recueil de poésie de Djamel Benmerad, sorti en Belgique, aux éditions Rebelles. Dès le départ, dans "Prélude", l'auteur annonce la couleur : "Je ne suis pas l'être d'alphabet/ ni cette colonne verbale/ qui répond aux maux des uns/ avec les mots des autres/ mais simple étincelle/ qui s'obstine/ à vouloir embraser/ un monde trop humide". Sur les 75 pages restantes, l'auteur, à travers des poèmes courts et lourds de sens pour la plupart, parle de l'écriture, de la persévérance, du dialogue infécond, de la jalousie, de la solitude, de l'amnésie et du masochisme. Sans toutefois cesser d'écrire "ce que tu voudrais/ mais n'oses pas/ dire". Le poète épelle les jours, n'arrête pas de pénétrer les profondeurs des eaux de l'écriture, dans l'attente de "l'ouragan salvateur/ cet ouragan qui lavera la terre/ de ses bourreaux". Il parle de ce qui l'unit aux Hommes et a même le temps de rire sur ces "sots" et ces "imbéciles" convertis en "moralistes". Avec toute sa tendresse, sa révolte et sa générosité, l'auteur avance sur le chemin des mots libérés, en fait ses complices pour raconter l'amitié et la camaraderie, la joie de voir "pleurer le sein/ à la lèvre enfantine", avant de signaler à l'ennemi : "Nos femmes valent/ mieux que vos hommes/ Elles l'ont prouvé". Il y exprime également "cette colère/ qui nous habite/ depuis l'enfance" et s'en prend au "silence des hommes" de chez nous. Djamel ne perd pas le nord. Il sait parler de l'amour du pays et se rappelle la terrible décennie sanglante dont il porte encore les stigmates, qui est témoin de la cruauté de ces "dieux désinvoltes/ qui s'adossent lourds de viols/ aux poitrines frêles de nos jeunes filles". Djamel Benmerad n'est pas de ceux qui cultivent l'amnésie, encore moins la lâcheté ! Il a une pensée pour Lounès Djaballah, ce militant du PAGS assassiné par les hordes terroristes le 6 novembre 1994, et dédie une autre "ode" à Rabéa, la veuve de Mohamed Sellami, tué par les islamo-terroristes. Dans son recueil, l'auteur chante avec ses tripes la "braise écrasée", les "exilés", les "Hommes libres", l' "Internationale" et la "liberté", une manière bien à lui de débusquer le malheur pour le "combattre", vomir "l'horreur/ de la trahison", faire "fleurir (le) chant et (le) drapeau", "combattre/ les puissants/ qui persécutent le travailleur/ la céramiste/ et le poète", sinon au moins "empêcher/ quelques puissants de bien dormir". L'espoir est présent. Malgré les "vents fourbes", Djamel se rappelle les "joies passées/ et (...) la vie à venir". Et même s'il a découvert d'autres ennemis à combattre, il a aussi identifié d'autres "rêves", "d'autres réalités" et "d'autres plantes à arroser". Pour lui, une "étincelle suffit/ à libérer tout un peuple" et demain verra "fleurir les champs/ et les rues autrefois gavées/ d'injustice". L'enfant de Gaza et la Palestine sont présents dans son écrit poétique. L'humour, parfois l'insolence et quelquefois les interrogations y sont également présents, à l'exemple de cette question sur l'impuissance de la CIA devant la poésie. Plus que tout, l'amour est présent chez le poète, principalement pour celle qu'il aime. Djamel Benmerad est journaliste d'investigation, ayant travaillé dans divers journaux algériens dont Le Matin, Alger Républicain et Le reporter du Sahara. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages dont La céramiste et le poète, Tracts pour rêver, On ne meurt bien qu'en Algérie", Chant d'impatience, 421 et Chants d'exil, suivi de Lettres à mon fils. Depuis son exil en Belgique, en 1998, Djamel Benmerad s'est "continué" plus encore dans l'écriture poétique : une poésie moderne aux traits libres et aux intonations insoumises. Être poète, pour lui, "c'est ne prétendre à rien et vouloir tout". Mais, c'est d'abord "accompagner et chanter la rébellion". Dans les entretiens qu'il a accordés, Djamel s'est exprimé sur la poésie, notant qu'elle "est vérité" et "regard" porté sur le cosmos. Il estime qu'il faut "bousculer, voire violenter l'Homme, pour l'éveiller", parce qu'il est convaincu que "le salut vient de l'éveil". Finalement, la journaliste Suzannah Horowitz, qui a préfacé son livre, a raison d'écrire que l'auteur "est en guerre". Une guerre déclarée contre la laideur et l'injustice. Un grand bravo l'artiste ! H A Nom Adresse email