Pour la 34e année consécutive, la Kabylie célèbre aujourd'hui l'anniversaire du Printemps berbère d'Avril 1980, pour faire aboutir cette revendication amazighe que la Kabylie sait toujours placer au-dessus de toutes les divergences politiques entre ses acteurs les plus influents. Trente-quatre années après cette date phare du 20 avril 1980, la population de Kabylie continue à sortir naturellement dans la rue pour à la fois exprimer sa fidélité et son attachement à l'esprit du Printemps berbère et revendiquer l'officialisation de tamazight, à laquelle, aujourd'hui, se sont greffées de nouvelles revendications qui diffèrent d'un acteur à un autre. C'est ainsi, d'ailleurs, que le Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie, MAK, dirigé par Bouaziz Aït Chebib, a appelé à des marches dites de "l'unité" dans les trois wilayas de Tizi Ouzou, Béjaïa et Bouira, avec comme slogan "Le rejet des résultats de la présidentielle en Algérie", "Pour l'union et la liberté de la Kabylie" et "Pour l'autodétermination de la Kabylie". Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), qui a pour habitude d'appeler à la marche du 20 Avril, s'est contenté, hier, d'appeler ses militants, à travers un communiqué, "à participer aux activités commémoratives dans toutes les régions où des initiatives sont prises" car, est-il estimé dans le communiqué, "chaque action est une pierre à l'édifice du difficile combat pour l'officialisation de la langue amazighe et la consécration des libertés démocratiques". Indirectement, le parti de Mohcine Belabbas, qui a, lui, avancé son habituelle marche du Printemps berbère au 15 avril dernier pour l'inscrire au même temps dans la disqualification de l'élection présidentielle de jeudi dernier, appelle aujourd'hui à participer aux marches du MAK. Outre le RCD, un appel à la marche dans les trois wilayas et qui a recueilli une quarantaine de signatures a été lancé par d'anciens acteurs et figures bien connus dans le combat pour l'amazighité dont Saïd Khelil, Saïd Boukhari, Mouloud Lounaouci, Saïd Doumane, Malika Baraka, Saïd Chemakh, Ahmed Aït Bachir et Rachid Oulebsir. "La Kabylie s'est investie dans le combat identitaire et la lutte pour les libertés démocratiques depuis l'émergence du mouvement national auquel elle a donné ses meilleurs enfants. Mais, 50 ans après l'Indépendance, les questions identitaire, démocratique et nationale restent toujours posées avec acuité et aucun signe d'évolution vers les attentes profondes et légitimes des citoyens ne se dessine à l'horizon", écrivent, dans leur appel, ces anciens militants du MCB qui invitent, à ce titre, à "une présence massive aux marches commémoratives du 20 Avril et se recueillir à la mémoire des martyrs de la cause amazighe, de la crise berbère de 1949 jusqu'aux événements sanglants de 2001 en Kabylie". Cette mobilisation vise, selon les rédacteurs de la déclaration de Tighremt, dans la wilaya de Béjaïa, à revendiquer le respect des libertés démocratiques et à porter haut et fort l'exigence de l'officialisation de tamazight, historiquement première langue de l'Afrique du Nord et de permettre ainsi à ses locuteurs de se donner les moyens juridiques et institutionnels pour son épanouissement dans le cadre d'un Etat de droit reconnaissant la diversité de la société algérienne. Pour sa part, le Congrès mondial amazigh, CMA, a appelé à participer à cette marche pour revendiquer le respect de la dignité des peuples amazighs, pour le respect des droits de l'Homme et de l'autodétermination, et aussi contre l'impunité. Le RND a également appelé ses militants à prendre part à la célébration du 20 Avril, mais "dans le cadre associatif et en dehors de toute caporalisation politique". Pour ce parti du pouvoir, il est question de "militer pour l'officialisation de tamazight". Une officialisation à laquelle le pouvoir algérien ne veut toujours pas procéder. À ce titre, il y a lieu de rappeler que même durant la campagne électorale, les membres du staff de la campagne de Bouteflika ne se sont jamais engagés à officialiser tamazight. Abdelmalek Sellal et Amara Benyounès s'étaient contentés de reconnaître la dimension et l'origine amazighe de l'Algérie, et de déclarer que "tamazight mérite mieux". Reste à savoir comment ce "mieux" sera traduit dans la Constitution dont on dit que la révision est pour bientôt. En attendant, en Kabylie, la population n'attend pas que tamazight lui soit offert. Elle lutte pour l'arracher. S. L Nom Adresse email