Avant son enterrement, hier, au cimetière populaire de Sidi-Abderrahmane à Alger, la dépouille de feu Mohamed Mechati a été exposée, durant toute la soirée ramadhanesque du lundi, pour un dernier recueillement, au très officiel Musée du monument du Martyr (Maqam Echahid). étrangement, la dépouille mortelle de ce monument de la Révolution n'a eu droit, en revanche, à aucune visite officielle. En effet, durant toute la soirée, pas un seul membre du gouvernement ou autre commis de l'Etat n'a été aperçu lors de cette cérémonie funèbre en l'honneur de l'un des piliers de la Révolution, l'un des rares rescapés du "groupe des 22". Passer sous silence la disparition du grand moudjahid parmi les moudjahidine est le choix des représentants de toutes les institutions de l'Etat, y compris celles "élues" et censées représenter le peuple, puisque aucun élu, à quelque niveau que ce soit, n'était présent, du moins durant cette veillée, pour rendre hommage à feu Mohamed Mechati. C'est dommage ! Pourquoi le pouvoir, ou du moins ceux qui le représentent actuellement, boude-t-il un événement aussi important dans la mémoire de la nation ? "Incompréhensible !", ont répondu, émus, des proches et des amis du défunt qui se sont recueillis sur sa dépouille. Certains compagnons de combat et du militantisme pour les causes justes ont tenu, malgré le poids des ans et leur état de santé visiblement pas très au point, à faire le déplacement. C'est le cas notamment de l'ancien chef de gouvernement, Belaïd Abdeslam, ou encore du doyen des défenseurs des droits de l'Homme, l'infatigable Ali Yahia Abdenour. Trahissant une fatigue apparente et visiblement très ému, M. Abdeslam s'est refusé à tout commentaire en cette douloureuse occasion. écrasant une larme, Ali Yahia Abdenour ne pouvait, quant à lui, ne pas revisiter le parcours "exemplaire de l'homme et du militant des causes justes". "Mohamed Mechati était un militant de la première heure ; il a d'abord rejoint le PPA dont la mission fondamentale a été celle de libérer le pays par les armes, puis le MTLD avant de figurer parmi les 22", a-t-il d'abord indiqué. Pour rappel, la réunion des 22, le 25 juin 1954 au Clos-Salembier à Alger, allait sceller la décision de déclenchement de la Révolution qui aboutira, sept ans plus tard, à l'Indépendance de l'Algérie, proclamée le 5 juillet 1962. Le hasard du calendrier a voulu que Mohamed Mechati quitte ce bas monde, à l'âge de 93 ans, la veille de cette date célébrant le 61e anniversaire de l'Indépendance. Le combat du moudjahid ne s'est pas arrêté en 1962. Selon le témoignage de son compagnon, Me Ali Yahia, après avoir contribué à libérer le pays du joug colonial, après l'Indépendance, Mohamed Mechati a entamé un autre combat, celui de l'opposition au régime qui accapare le pouvoir jusqu'à ce jour. "En 1962, nous avions libéré l'Algérie du colonialisme, mais n'avions pas libéré le peuple ! Depuis 1962 à ce jour, nous, Mechati, moi et bien d'autres, sommes toujours dans l'opposition avec le système en place qui n'a jamais changé", a réaffirmé le doyen des droits de l'Homme et militant de la démocratie, selon qui le combat de Mohamed Mechati vise l'objectif noble de rendre le pouvoir au peuple. Mohamed Mechati, rappelle-t-il, milite pour que le peuple accède au pouvoir à travers des élections libres et qu'il soit représenté dans toutes les institutions élues, et que les militaires se limitent à leur mission de servir la Nation. Mohamed Mechati voulait "une Algérie pour toutes les Algériennes et tous les Algériens". Ses fondamentaux, soutient, honorée, sa belle-fille, sont surtout "la liberté et la dignité". Il milite surtout pour que "l'Algérie reste debout". Il était, témoigne encore sa proche,"toujours près du peuple et loin des injustices". Pour ceux qui l'ont connu et côtoyé, il est tout simplement "l'exemple à suivre dans bien des domaines". Du grand moudjahid, le peuple retiendra aussi et surtout sa modestie. La preuve, même après sa mort, il est boudé par les gardiens du temple ! F A Nom Adresse email