M.Boudiaf, expert pétrolier, livre ici les raisons de son départ et commente la politique de ressources humaines à Sonatrach : "En 2008, je suis parti en Libye travailler dans l'exploration (blocs décrochés par Sonatrach dans le bassin de Ghadamès) suivant un contrat administratif de trois ans. On a acquis une expérience en Libye. C'était le premier projet exploratoire opérationnel de Sonatrach à l'étranger. On a fait des découvertes de pétrole. On a récupéré 60 millions de dollars (argent investi par Sonatrach remboursé par la Libye en cas de découverte). A l'issue du contrat, on nous a demandé de rentrer et de retourner à nos postes initiaux. Alors qu'on aurait dû nous envoyer dans un autre pays faire de l'exploration forts de l'acquis, de l'expérience et des succès réalisés en Libye. J'ai refusé cette situation. J'ai quitté Sonatrach. J'ai créé ma propre boîte de consulting en association avec un Libyen." Selon l'expert, il y a beaucoup de népotisme à Sonatrach. Il faut avoir le bon extrait de naissance. Il y a le clanisme et le régionalisme réunis à Sonatrach. Il nuance cependant ses propos : il y a des compétences à Sonatrach. Le problème est la gestion des ressources humaines. Boudiaf souligne dans la foulée que 160 spécialistes du forage ont quitté Sonatrach. Ils sont très demandés dans beaucoup de pays dans le monde, notamment au Kazakhstan. A cause de l'hémorragie de cadres, Sonatrach manque aujourd'hui de ressources humaines qualifiées : des superviseurs forage, des wireliners, des géologues, des géophysiciens. Elle fait de plus en plus appel à des foreurs, des spécialistes en forage payés à 1500 euros/jour. On fait appel à des bodyshops, des boîtes internationales qui proposent du personnel qualifié. Concernant les salaires, un foreur à Sonatrach touche 10 fois moins qu'un foreur dans une compagnie étrangère. Les salaires à Sonatrach sont bas. Cela ouvre la voie à la corruption et à la fuite des compétences. Il n'est pas normal qu'un directeur à Hassi Messaoud touche touche entre 9 à 20 millions de centimes par mois, alors qu'il procure à Sonatrach chaque année 100 millions de dollars. En cas de découverte de pétrole et de gaz, l'ingénieur algérien touche en primes 1 à 3 millions de centimes, son homologue étranger 20 000 dollars, soit 140 millions de centimes. En conclusion, l'expert préconise de réformer le secteur pétrolier. En matière de formation, l'IAP, le centre de formation des ingénieurs de Sonatrach, devrait comme avant devenir un institut digne d'une grande compagnie pétrolière.