C'est pratiquement dans l'anonymat que des milliers de travailleurs ont perdu leur emploi en raison du malaise profond que vit la branche. Les importations de chaussures en provenance d'Asie, et les spéculateurs sévissant dans le secteur du cuir et des peaux ont concentré toutes les critiques formulées par des opérateurs de la région Ouest activant dans ce secteur, au cours d'une rencontre abritée par la Chambre de commerce et d'industrie d'Oran (CCIO). Le secteur du cuir et des peaux est en pleine crise, que ce soit dans le public ou le privé. Des milliers d'emplois ont été supprimés, ces dernières années, et la situation ne risque pas de s'améliorer, compte tenu des problèmes fondamentaux qui persistent et de l'absence de réaction de la part des pouvoirs publics pour aider ce secteur par la mise en place de mesures concrètes. Ainsi, les intervenants divisés entre tanneurs et fabricants ont été unanimes pour dénoncer les importations massives de chaussures en provenance de Chine et de Taïwan, la fuite des matières premières, les spéculateurs activant au niveau de la collecte des peaux, l'informel, la pression fiscale et parafiscale, etc. Le représentant de la Fédération du cuir et des peaux affilié à la confédération algérienne du patronat, a également, dans son intervention, fustigé la précipitation de l'ouverture du marché, souhaitant probablement que cette ouverture ait été accompagnée de mesures de protection de la production nationale et les importations qui sont une concurrence déloyale. Ce dernier, donnera le chiffre de 24 millions de paires de chaussures importées, dont 90% en provenance de Chine et 10% de Taïwan. Il y a eu 37 000 chaussures en plastique importées et qui sont, qui plus est, déconseillées pour des raisons d'hygiène sanitaire, 1 900 000 chaussures en textile. Là aussi, 73% de ces importations proviennent de Chine. En 2003, il y a eu 22 millions de produits finis importés, toujours selon l'orateur. Poursuivant leur débat, les opérateurs reprochent au gouvernement de ne pas instaurer des contrôles sur la qualité et les normes au niveau des douanes, tandis que d'autres dénoncent particulièrement les fausses déclarations sur la valeur. Un opérateur, membre de l'association nationale algérienne des producteurs de chaussures et composants (Anapcc), citera en exemple “des importateurs qui déclarent à 0,50 dollar la valeur de leurs importations; ce qui revient à payer 35 DA de taxes alors que le fabricant national, qui importe de la matière première, devra s'acquitter de 100 à 150 DA au titre de droit et taxes divers. Comment voulez-vous que l'on puisse résister à cela, il y a une concurrence déloyale flagrante”. La plupart des fabricants ont affirmé que ces dernières années, ils ont été contraints de licencier la moitié de leurs travailleurs, d'autres ayant carrément cessé toute activité. Le malaise est profond dans ce secteur, la concurrence déloyale a été accentuée par un autre phénomène, la flambée des prix des peaux qui sont passés (entre 2003 et 2004) de 20 DA à 400 DA. Les spéculateurs, qui sévissent dans le circuit de la collecte des peaux et l'exportation frauduleuse de la matière première notamment, vers les frontières de l'Est, la baisse de l'abattage, sont les explications avancées par les tanneries et les fabricants. Un autre reproche de taille en direction des pouvoirs publics ; selon ces derniers, le fait que l'Algérie soit le seul pays au monde autorisant l'exportation de peaux brutes, alors que tous les producteurs mondiaux l'interdisent catégoriquement pour valoriser leur matière première. F. B.