La période la plus cruciale sera celle du retour de ce dangereux insecte prévu à l'automne. La lutte contre l'invasion du criquet pèlerin continue. La bataille, livrée jusque-là par l'Etat algérien, est loin d'être gagnée. S'il a été stoppé un tant soit peu dans son ascension vers le Nord du pays, il n'en demeure pas moins que le danger persiste. Pis, la période la plus difficile est attendue pour le mois de juillet. Car, à ce moment-là, le criquet deviendra mature et doit consommer un maximum de végétation pour pouvoir voler. Après avoir attaqué une superficie estimée à 1,6 million d'hectare, dès le 25 février dernier, l'opportuniste insecte a pondu des œufs devenus plus tard des larves. Celles-ci ont été traitées sur une surface qui dépasse les 831 000 ha. Le criquet marocain a été, en outre, “combattu” sur un espace avoisinant les 38 000 ha. Sur 29 wilayas infestées, Biskra, El-Oued, Ghardaïa, Djelfa, Laghouat et Naâma restent les plus touchées. Ces jours-ci, selon la déclaration de certains responsables, il se dirigera vers le Niger et le Mali. Durant sa traversée du désert, il marquera des pauses dans la nuit aux… oasis, et reprendra son périple le jour. Son retour est, en revanche, attendu pour les mois de septembre, octobre et novembre prochains. Le criquet voit le jour dans des zones stériles et se développe sur les terres fertiles. À son arrivée en Algérie, en provenance de la Mauritanie, il était déjà dangereux. Les pluies inattendues, qui se sont abattues en mai dernier et au cours de ce mois de juin, n'ont fait que favoriser son implantation. Les services concernés, faut-il le rappeler, ont commencé la lutte en septembre 2003 en dépêchant 27 équipes pour des interventions au Mali et au Niger. Cette action se veut préventive contre les infiltrations quasi imminentes de cet insecte à partir des pays du Sahel et du Sud. Les groupes envoyés sur place ont traité quelque 132 700 ha dont 100 000 en Mauritanie, 30 000 au Mali et 2 700 au Niger. Qualifié par le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, M. Saïd Barkat, de pays de lutte anti-acridienne par excellence de par ses moyens notamment, l'Algérie a, selon lui, réalisé de gros efforts dans ce sens. Sur une enveloppe globale de 6,4 milliards de DA, dégagée par le gouvernement, près de 3,9 milliards de DA ont été dépensés. Plus de 21 000 ha envahis n'ont cependant pas été traités. La première phase de la lutte étant achevée, le regard est désormais orienté vers la seconde qui est, se plaint le ministre, plus dangereuse. “Nous devons nous préparer au mieux pour appréhender cette deuxième phase”, s'est-il exprimé en s'adressant aux cadres réunis hier à Alger. “Nous sommes dans un moment de crise, nous devons nous préparer en conséquence”, souligne-t-il. Le premier responsable du département de l'Agriculture avoue que la prise en charge du problème doit être horizontale et implique tous les secteurs d'où la décision de confier le poste de commandement des actions de lutte au wali. Les outils et autres instruments mis en place par l'Etat ont permis aux intervenants d'avoir des informations sur la direction des vents, sur la pression, l'humidité, les orages, la protection des végétaux… Ce qui les aide, explique M. Barkat, à prendre les décisions qu'il faut. Toutefois, rassure-t-il, le “danger est relativement écarté”. Pour maintenir ses hommes mobilisés, le ministre prévient l'assistance dans une ultime déclaration : “S'il revient en octobre ou en novembre, il faut qu'il nous trouve fin prêts…” Repères - La capacité de reproduction du criquet pèlerin et son caractère transfrontalier nécessitent d'intenses efforts pendant au moins deux années. - Selon le ministre de l'Agriculture, il existe 54 000 citernes en Algérie. Ce qui n'est pas négligeable dans la lutte anti-acridienne. - La signalisation des premières incidences sur l'agriculture sont, selon les services du ministère, en cours d'évaluation. - Le stock des pesticides destinés à la lutte contre le criquet pèlerin est de 333 600 litres. - Le traitement des zones infestées a mobilisé 1 200 agents, 75 camions bien équipés, 72 véhicules légers dont 26 équipés d'appareils, 10 aéronefs dont 5 avions et 5 hélicoptères affrétés des compagnies, Tassili Airlines, Savenor et Midair. - Les experts estiment que le printemps de l'année 2005 constituera la phase à grand risque pour tous les pays d'Afrique du Nord particulièrement l'Algérie et le Maroc. B. K.