Pour les habitants de la capitale, il semble falloir aller de plus en plus loin pour profiter de la plage. La confiscation du Club-des-Pins et de Moretti a causé une grande frustration, chez les plus jeunes notamment. Cette lettre d'une étudiante d'Alger, Y.A.S., exprime la rancœur de ces jeunes spoliés depuis des années de “leur” plage. M. H. “Nous sommes tous des frères, nous nagerons tous dans la même mer…” Enfin presque ! Vous souvenez-vous de la plage du Club-des-Pins… ? Il y a bien longtemps maintenant, elle était ouverte à tous. Elle était de loin la plus populaire à Alger, en particulier auprès des jeunes. Tous les jours d'été, des centaines de jeunes gens et de familles venaient y prendre le soleil et profiter de la mer. Ne soyons pas hypocrites, ce n'était pas Saint-Tropez, mais quand on est jeune et Algérien, on sait se contenter de ce que l'on a. Et puis, franchement, pour une fois, ce n'était pas mal du tout. Jusqu'au jour où le gouvernement déclare : “Nous vivons une époque dangereuse”. Je dirais même trop dangereuse, en effet ! Alors le gouvernement se dit : “Et si nos chers ministres et leurs cours méritaient une plage privée, une plage rien que pour eux, une plage pour se détendre avec leur famille”. “Après tout, si l'Algérie tient encore debout c'est grâce à eux. En plus, avec tout ce terrorisme omniprésent, c'est le devoir de tout honnête citoyen de leur donner cette plage ou, devrais-je dire, de les laisser la prendre…” “Mais quelle plage allons-nous choisir ?” se demande le gouvernement. Les militaires, le président et leurs cours ont déjà une plage ; pourquoi ne pas la partager ? Après tout, malgré les apparences, nous sommes tous des frères ! Non, non et non, nous devons avoir une plage rien qu'à nous ; nous allons prendre le Club-des-Pins, La plage des Algérois. Nous, gouvernement, méritons sérénité et sécurité, pour aller faire trempette. Club-des-Pins, tu seras À NOUS ! Depuis, cette plage n'est hélas plus accessible au citoyen Lambda. Fini “Bigné cho”, fini les “complets” chez Chrif, fini les oublies (?) ! Je vous rassure, il reste de l'espoir : avez-vous une carte (même fausse) de la liste qui suit ? Résident, invité, militaire… une carte prouvant que vous êtes de nationalité étrangère, le justificatif que vous êtes un maquignon, la carte grise d'une 406… Je résume, pour rentrer au Club-des- Pins, il faut une carte de n'importe quoi qui puisse prouver que vous, mon cher ami, vous n'êtes pas n'importe qui. C'est la plage des ministres quand même ! Et les années passent, et les citoyens trépassent, jusqu'au jour où, le gouvernement annonce fièrement qu'il n'y a plus de terrorisme en Algérie, enfin presque… disons qu'il en reste juste assez pour que les ministres et leurs cours gardent NOTRE plage. Que pouvons-nous faire ? Voici les solutions proposées : Faire comme tout le monde, à savoir, ravaler son nez et toute dignité et : 1- feinter les gendarmes assommés par le soleil, 2 - se faire de nouveaux amis, vous l'aurez compris, de préférence parmi les progénitures des ministres ou de leurs cours, 3 - rester tranquillement chez soi et regarder sur l'ENTV les victimes potentielles du terrorisme s'amuser au Club-des-Pins, 4 - attendre le salut de la canicule ou de la conjonctivite. Alors comme pourrait le dire ce cher Hakim Laâlam : “Buvons de l'eau de mer polluée, mangeons du sable, le cauchemar continue et n'est pas près d'être fini”. H. M.