Le gouvernement français ne cède pas aux exigences des ravisseurs islamistes. La loi sur le voile sous le couvert de laquelle “l'Armée islamique” irakienne veut entraîner la France dans le bourbier irakien a été adoptée en mars dernier et vise à interdire le port ostensible de signes religieux à l'école publique. Critiquée lors de son adoption par les intégristes de tous poils, de France et d'ailleurs, elle a été invoquée pour justifier l'enlèvement de deux journalistes français par ce groupe qui a donné à la France un ultimatum de 48 heures pour répondre à ses exigences d'abrogation du texte. Mais la loi “sera appliquée” comme prévu jeudi, jour de la rentrée scolaire en France, a assuré, hier, le porte-parole du gouvernement Jean-François Copé. “Elle sera appliquée. C'est le cadre de la loi de la République bien sûr. Je retiens de ce que nous vivons une France plutôt rassemblée et unie (...) C'est un bel hommage aux valeurs de la République”, a déclaré M. Copé. Interrogé sur une éventuelle “suspension” de la loi, le ministre a souligné que “le problème ne saurait se poser en ces termes”. “La volonté qui est la nôtre est, premièrement, de n'accepter aucun amalgame, et deuxièmement, de rappeler que les valeurs de la République française sont une référence pour l'ensemble du monde”, a-t-il poursuivi. “Ce sont les valeurs de tolérance, de respect et notamment cette idée qu'en France on doit pouvoir exercer librement son culte, si on le souhaite, dans le respect de celui des autres”, a souligné le ministre. Pour M. Copé, “au-delà de l'indignation que nous ressentons tous, c'est l'heure de la mobilisation”, et “ce qui ressort de ces dernières heures, c'est le sentiment d'une France unie et rassemblée”. Cette loi, adoptée afin de protéger les filles soumises au diktat de certains intégristes, n'a pas soulevé l'enthousiasme de nombreuses associations islamistes, y compris une partie du Conseil français du culte musulman (CFCM), l'interlocuteur officiel des pouvoirs publics. Dans le monde arabe, elle avait suscité de vives protestations. Avant même que le président Jacques Chirac ne se décide en faveur d'une loi, un dignitaire chiite de Nadjaf (Irak), Mohammad Ali Yacoubi, lui demandait le 12 décembre 2003 de ne pas interdire le port du voile islamique, “partie intégrante de la femme musulmane”. Le 22 décembre, le mouvement égyptien des Frères musulmans affirmait qu'il “s'opposait fermement” à cette décision, estimant qu'“elle sème les graines de la haine entre la France et les peuples musulmans”. À Beyrouth, le mufti sunnite Cheikh Mohammad Rachid Qabbani condamnait une décision “qui va à l'encontre de la liberté de la femme musulmane”. À Téhéran, le président Mohammad Khatami demandait à la France d'“annuler” sa “décision erronée”. Des manifestations contre la loi ont eu lieu au Liban, à Bahreïn, en Jordanie, en Egypte, en Indonésie et dans la bande de Gaza, ainsi qu'en France où une partie de la communauté musulmane a bataillé ferme contre ce texte. En Egypte, l'imam d'Al-Azhar, cheikh Mohamed Sayyed Tantaoui, la plus haute autorité de l'islam sunnite, a été l'un des rares du monde musulman à ne pas désapprouver. Le 24 février, le numéro deux d'Al-Qaïda, Ayman Al-Zawahiri, avait estimé que l'interdiction du voile dans les écoles publiques françaises “dénote une fois encore de la rancune des Croisés occidentaux contre les musulmans”. Deux jours avant les menaces de la guérilla irakienne, le ministre français de l'Education nationale François Fillon invitait la communauté éducative à appliquer “sans concession” la loi. Y. K.