Le Festival international Abalessa-Tin Hinan pour les arts de l'Ahaggar (Fiataa) de Tamanrasset a consacré sa troisième soirée à Athman Bali. C'est une soirée-hommage animée par plusieurs formations qui ont appris auprès de lui, qui se sont inspirés de son œuvre et qui la prolongent en la (ré)interprétant, la prolongeant et la transformant. Athman Bali, disparu en 2005, nous a quittés beaucoup trop tôt mais il a tout de même laissé un héritage inestimable. Il a créé son propre style, introduit le oud dans sa musique et a été véritablement un messager de l'art et de la musique dans le monde. Un artiste de talent et un virtuose de oud qui a laissé des chansons éternelles à l'exemple de "Damâa" ou "Amine". L'année 2015 coïncide avec le dixième anniversaire de sa disparition, et les organisateurs du Fiataa ont décidé de lui consacrer un hommage le premier jour de cette année. En effet, avant-hier soir, le public nombreux du campement de Tidessi (à une dizaine de kilomètres de Tamanrasset) a assisté, lors de la troisième soirée du cinquième Festival international Abalessa-Tin Hinan pour les Arts de l'Ahaggar, à un hommage organisé autour d'une série de concerts animés par des artistes et des formations influencés par le style d'Athman Bali ou ayant connu et appris à ses côtés. Rezkaoui et sa troupe Tinissa de Tamanrasset ont été les premiers à se produire sur scène. Maniant son instrument avec dextérité et largement influencé par l'œuvre du maître Athman Bali, Rezkaoui a intégré de nouveaux instruments à l'exemple du violon, des karkabous ou de la basse. Tout en conservant l'intégrité du style Bali, Tinissa apporte sa propre lecture à ce genre musical et donne des accents modernes à sa musique. Pour Rezkaoui, qui a côtoyé l'artiste disparu, "Athman Bali représente tout pour nous, c'est quelqu'un qui a créé quelque chose et que beaucoup ont appris auprès de lui ou se sont inspirés de lui". Miloud Choughli, disciple de ce monument de la chanson, a, pour sa part, présenté des reprises et des compositions personnelles. À l'issue du concert, il soulignera que "l'âme et l'authenticité des musiques traditionnelles" n'ont jamais été affectées par les apports de Bali. En troisième partie de la soirée, le fils de l'artiste, Nabil Bali, qui trace sa propre voie dans le monde de la musique, a assuré le show, en revisitant à la guitare différents morceaux qui figurent sur ses quatre albums sortis en France. Avec une orchestration moderne, des influences diverses notamment reggae, le groupe de Nabil Bali a instillé de la joie de vivre. Petit regret : on aurait aimé le voir évoluer sur scène avec un oud, d'autant qu'il joue aussi bien du luth que de la guitare, et surtout il s'agissait d'un hommage à son père, maître du oud. Mais Nabil et ses talentueux musiciens n'ont point démérité, bien au contraire, ils ont réussi à capter l'attention du public, en proposant une musique joviale aux accents folk. À l'issue de sa prestation, Nabil Bali a rappelé que son père "a laissé 261 textes" qui sont un précieux legs, et qu'il exploitera dans ses prochains disques. L'artiste a confié également être sur le point d'enregistrer un nouvel album à Djanet avec les membres de la troupe de son père. La soirée se terminera avec les concerts de la troupe Toumast N'Ténéré de Djanet et Imenir de Tamanrasset. Somme toute, bien qu'inspirés fortement par le style d'Athman Bali, les groupes qui se sont produits jeudi soir ont surtout montré que le regretté artiste a ouvert la voie et qu'il leur appartenait d'apporter les changements qui leur semblent nécessaires pour prolonger l'œuvre de Bali. Par ailleurs, ouverte mardi dernier avec une soirée spéciale Assouf (blues du désert) qui a vu défiler quatre formations musicales s'illustrant dans ce style, précédée par une cérémonie Tindé (des femmes jouant de cet instrument qui donne son nom au style et déclamant de la poésie et des hommes paradant en dromadaires), le 5e Fiataa se poursuivra jusqu'au 4 janvier prochain, avec une riche et belle programmation artistique. Outre la musique, le Fiataa met en valeur le savoir-faire des artisans à travers des expositions-ventes d'artisanat traditionnel (cuir, vannerie, bijoux) mais également de photographies ("Revisiter les précédentes éditons du Fiataa", "Hommage au photographe et artiste Fayçal Mohamed Abdelazziz", "Techniques et produits en cuir'), ainsi que des ateliers (danse, manga, calligraphie). S. K.