Des élus et des responsables d'associations ont affiché leur scepticisme quant à l'application du Schéma d'aménagement de l'espace et de programmation territoriale (Sept), qui était en débat, hier, à Boumerdès, en présence de la ministre de l'Environnement et de plus de dix walis de la région centre. Cet instrument de prospective territoriale, présenté par le bureau d'études Bneder, devra faire un état des lieux qui permettra le diagnostic, les tendances et les enjeux majeurs pour les 20 ans à venir au niveau de tout le territoire national suivant les orientations tracées par la loi n°10-02 du 29 juin 2010, relative au Schéma national de l'aménagement du territoire (Snat). Mais les élus des dix wilayas et les associations ont exprimé leur crainte de voir cet instrument jeté aux oubliettes comme tous les plans de développement et aménagement promulgués depuis l'Indépendance du pays. "Comment parler d'aménagement du territoire alors que des terrains agricoles sont transformés en béton chaque jour et en toute illégalité au su et au vu de tout le monde ?", demande un président d'association de Béjaïa, qui ajoute que "tout le monde sait que le littoral de Béjaïa et des espaces verts sont envahis constamment par les constructions illicites en violation des lois de la République". Une autre élue de l'APW de Tizi Ouzou s'est interrogée sur les mécanismes et les garanties susceptibles de rendre applicable un schéma aussi ambitieux quand on sait que les PDAU qui sont souvent non appliqués mettent plus de cinq ans pour leur mise en œuvre. "Comment faire pour que ce plan d'aménagement soit réalisé, protégé et respecté", s'est-elle demandé. Pour sa part, le président de l'agence foncière a mis en exergue certaines difficultés qui rendent pénible l'application de ce plan. "Nous sommes sur le terrain, et laissez-moi vous dire que les plans mis en place depuis 1962 sur l'aménagement n'ont pas connu une application sur le terrain", ajoutant que "seule une décentralisation permettra aux walis de faire respecter ce schéma". Le maire de Dellys a, lui aussi, étalé son incrédulité sur l'application réelle sur le terrain de ce schéma en relevant les contradictions constatées sur le terrain en matière d'aménagement du territoire. "Le développement économique se fait au détriment de l'environnement et les besoins urgents des citoyens nous obligent à prendre des décisions qui vont à l'encontre des différents plans de développements et de l'environnement", a-t-il expliqué. Une architecte s'est, elle aussi, interrogée sur la non-application de la loi en évoquant les nombreuses constructions illicites qui poussent un peu partout en violation de la loi. Elle s'est demandé comment les lois PDAU, les POS et les lois sur l'urbanisme ne sont pas évoqués dans le document. Les élus et les associations ont tous insisté sur la nécessité de décentraliser certaines activités et donner plus de libertés aux responsables et élus locaux. Le directeur du bureau d'études (Bneder), M. Salah-Bey, qui a présenté ce projet, a, lui aussi, parlé d'une forte pression qui s'exerce sur le foncier dans le centre du pays, affirmant que "si rien n'est fait à court terme, 20 000 ha de terres agricoles, au minimum, seront sacrifiés pour les besoins de la population en matière d'habitat et d'activités liées aux secteurs des services et de l'industrie". Pour la ministre de l'Environnement, Mme Dalila Boudjemaâ, ce projet va impulser une réorganisation du territoire et corriger les graves distorsions constatées, mais aussi s'adapter au mieux aux exigences du nouveau contexte économique, tout en veillant sur la durabilité et le développement de toutes les régions du pays. M. T.