La solution du conflit en Syrie doit-elle passer par des négociations avec Bachar al-Assad ? C'est l'interrogation que se pose l'Occident après l'option envisagée par les Etats-Unis et qui préconise des discussions avec le dictateur de Damas pour contrecarrer la barbarie du groupe autoproclamé "Etat islamique". Les Occidentaux ne s'entendent plus sur la manière de résoudre la crise syrienne. Entre Washington, Londres et Paris, les sons de cloche diffèrent. Le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, a admis que Washington devra négocier avec le président syrien Bachar al-Assad pour mettre fin au conflit. "Au final, il faudra négocier. Nous avons toujours été pour les négociations dans le cadre du processus (de paix) de Genève 1", a déclaré M. Kerry, dans une interview diffusée sur la chaîne CBS dimanche. Washington travaille à "relancer" les efforts visant à trouver une solution politique au conflit, a dit le chef de la diplomatie américaine. Mais Marie Harf, une porte-parole du département d'Etat, s'est empressée de préciser sur Twitter que John Kerry avait "réitéré la ligne que nous suivons depuis longtemps. Nous avons besoin d'un processus de négociations avec la participation du régime. Il n'a pas parlé de négociations directes avec Assad". Lors de l'interview sur CBS, M. Kerry a d'ailleurs reconnu qu'il n'entendait pas relâcher la pression sur le président syrien "pour bien lui faire comprendre que tout le monde est déterminé à trouver une issue politique". Jusqu'ici, pourtant, l'administration Obama se montrait plus préoccupé par la lutte contre le groupe Etat islamique, qui contrôle des régions entières d'Irak et de Syrie. Elle appelait aussi de façon constante au départ de M. Assad. Reste à s'entendre sur les modalités de négociations avec Damas. À l'évidence, Washington chercherait à accompagner vers la sortie le président al-Assad, dans une sorte de transition que favoriseraient les négociations de Genève avec l'opposition, suivant un calendrier consensuel. Cette esquisse de sortie de crise ne fait pas l'unanimité, pour autant. Elle a eu pour effet de montrer même des lézardes dans le bloc occidental, qui risque de voir la perfide Albion faire défection à la coalition anti-EI. Le Royaume-Uni a répété dimanche que Bachar al-Assad n'avait aucun rôle à jouer dans le futur de la Syrie. "Assad n'a pas sa place dans le futur de la Syrie", a déclaré une porte-parole du ministère britannique des Affaires étrangères, en réaction aux déclarations du secrétaire d'Etat américain John Kerry. Le pays de Sa Majesté la reine Elizabeth affiche même la volonté de continuer à mettre la pression sur ce régime par des sanctions, jusqu'à ce qu'il mette un terme aux violences et engage de réelles négociations avec l'opposition modérée. À Paris, on souhaite "un règlement politique négocié entre les différentes parties syriennes", mais Bachar al-Assad "ne peut s'inscrire dans un tel cadre". C'est ce qu'a répété, hier, Paris, alors que le débat sur la nécessité de négocier avec le président syrien a été relancé par Washington. "Notre position est connue et s'inscrit dans le cadre du communiqué de Genève de 2012 : notre objectif est un règlement politique négocié entre les différentes parties syriennes et conduisant à un gouvernement d'unité", a déclaré le porte-parole du Quai d'Orsay, Romain Nadal. Mais qu'à cela ne tienne, l'annonce par le chef de la diplomatie américaine, John Kerry, constitue une matière de fierté pour le régime syrien, qui entrevoit déjà,"une reconnaissance de la légitimité" de Bachar al-Assad, comme l'a fait entendre, hier, lundi, la presse officielle syrienne. D'ailleurs, le président syrien Bachar al-Assad a affirmé, hier, que les Etats-Unis devaient joindre les "actes" à la parole, après les déclarations du secrétaire d'Etat John Kerry affirmant que Washington devait négocier avec le régime. "Nous écoutons toujours les déclarations, nous devons attendre les actes et à ce moment-là nous déciderons", a affirmé M. Assad, selon des propos reproduits par l'agence syrienne officielle Sana. A. R.