Les combats opposant l'armée libyenne aux milices se sont intensifiés, hier, à la veille de la reprise des pourparlers de paix à Alger, sous l'égide de l'Organisation des Nations unies. Parallèlement, la branche libyenne de l'Etat islamique s'est attaquée à la représentation diplomatique de la Corée du Sud, tuant deux gardes. La Libye poursuit sa descente aux enfers, au moment où les efforts diplomatiques tentent de juguler les violences armées qui n'épargnent aucune ville du nord du pays. Hier matin, des combats meurtriers ont opposé les soldats du général Khalifa Haftar à la coalition des milices islamistes dans la ville d'Al-Azizia, à une trentaine de kilomètres au sud de la capitale Tripoli. À Benghazi, l'armée a perdu une dizaine de soldats et une quarantaine d'autres blessés, lors d'un accrochage avec Ansar al-charia. Cette milice islamiste avait fait allégeance à Al-Qaïda l'été dernier, date à laquelle elle a pris le contrôle d'une grande partie de cette ville de l'Est libyen, où se sont exilés le gouvernement et le Parlement reconnus par la communauté internationale. Les combats à Benghazi et ses environs sont, en effet, quasi quotidiens entre les milices islamistes et les troupes de Khalifa Haftar. Avant sa nomination, en mars, à la tête de l'état-major des forces armées, Haftar avait lancé, en mai 2014, l'"opération al-Karama", une vaste offensive terrestre et aérienne, mais qui ne semble pas venir à bout des milices radicales, dont certaines sont exclues du dialogue interlibyen. Malgré les appels fusant de partout en faveur de la cessation des combats, les parties libyennes en conflit, depuis la chute du régime de Kadhafi en 2011, poursuivent leur lutte pour étendre leur territoire dans l'espoir d'influer sur le cours des négociations. Outre la guerre opposant l'armée aux milices, une guerre parallèle fait rage entre la milice islamiste et les terroristes de l'Etat islamique (Daech), dans la ville de Misrata. Fajr Libya, qui contrôle Tripoli depuis fin août, est originaire de Misrata, ville côtière située à 213 kilomètres à l'est de la capitale libyenne. L'armée libyenne s'est aussi engagée dans un meurtrier face-à-face avec Daech à Syrte, la ville natale du défunt guide d'al-Djamahirya, Mouammar Kadhafi, tué à l'issue de neuf mois de révolte populaire en 2011. Cette guerre multidimensionnelle risque de conduire, à court terme, à un échec des pourparlers de paix et à un éclatement de ce pays voisin, si la médiation internationale n'arrive pas à faire entendre raison aux parties en conflit d'ici à quelques semaines. Dans une mouture pouvant servir de feuille de route pour le dialogue interlibyen, le représentant du secrétaire général de l'ONU en Libye, Bernardino Léon, a proposé la formation d'un gouvernement d'unité nationale. Cette proposition a été accueillie positivement par la classe politique libyenne. Il restera à convaincre le gouvernement exilé à Tobrouk et l'exécutif parallèle de Tripoli, mis en place par Fajr Libya, pour l'ouverture d'un dialogue constructif, capable d'aboutir à un consensus politique rapidement. Autrement, c'est à Daech que profitera ce chaos politique. D'ailleurs, l'Etat islamique a profité encore de cette anarchie pour commettre une nouvelle attaque contre l'ambassade de la Corée du Sud à Tripoli, tuant deux gardes libyens. L. M.