L'école coloniale était un lieu de découvertes mais aussi un déchirement, une rupture avec la langue maternelle et le milieu culturel, une violence inouïe, une folie, un non-sens et un contenu scolaire étranger. Invitée par la CEMA, la professeure-assistante au département de français à l'université Georgetown, Erin Twohig, a présenté, mercredi dernier, ses premiers travaux sur le thème "L'école dans la littérature, la littérature à l'école, et lecture autour du système scolaire en Algérie". "Le choix du thème obéit à un intérêt personnel. J'ai toujours aimé les langues (elle maîtrise le français et l'arabe), et cette question de l'école dans la littérature est un sujet assez fécond", souligne Erin Twohig. Elle scindera son intervention en deux parties : l'école coloniale dans la littérature, et ensuite postcoloniale. Plusieurs romans d'auteurs (surtout d'origine algérienne) d'expression française, dont Mouloud Feraoun, Mohammed Dib, Maissa Bey, Assia Djebar, ont été la cible de ses travaux. Pour certains écrits, l'école coloniale était un lieu de découvertes mais aussi un déchirement, une rupture avec la langue maternelle et le milieu culturel, une violence inouïe, une folie, un non-sens, un contenu scolaire étranger (histoire et géographie française). Celle postcoloniale, de l'Algérie indépendante, est le retour au présent, à l'exemple des événements de Sétif et Guelma. Il y a aussi le contenu linguistique de l'école qui apparaît dans les écrits. Souvent, les écrivains sont déchirés entre le monde de l'école et celui de la famille. "Le Fils du pauvre, de Mouloud Feraoun, est une forme de résistance. L'expérience de l'école française a été une blessure pour l'auteur. On peut dire que l'école française a occupé une place importante dans la littérature algérienne où les auteurs ressentaient le besoin de prendre la parole et exprimer leur amour de cette langue apprise à l'école malgré les blessures qu'elle a apportées", souligne la conférencière. Le système scolaire postcolonial a provoqué beaucoup de questions surtout après l'arabe, langue nationale, qui a créé un déchirement linguistique chez les auteurs francophones. "Quelle place accordera l'école postcoloniale à l'identité berbère ? Un débat linguistique plus compliqué qu'auparavant est apparu." En fait, les débats sur le système scolaire après l'indépendance sont restés au niveau théorique. La littérature participe à la formation et à la reformulation de la culture et l'identité nationales, selon la professeure Erin Twohig. N.B.