La crise qui agite le parti depuis août 2013, sinon bien avant, n'a, à l'évidence, rien d'un conflit organique qui s'est enlisé faute des arbitrages d'autrefois. Sa nature est plus politique qu'organique. Les caciques du Front de libération nationale (FLN) refusent, pour la plupart, de prendre place dans la "diligence" que conduit le secrétaire général du parti, Amar Saâdani. Après avoir ferraillé sans relâche à gêner le mandat du successeur d'Abdelaziz Belkhadem à la tête du parti et espéré, ensuite, voir la justice les conforter dans leur démarche de contestation, ils ont décidé, en désespoir de cause, ne pas être du 10e congrès du parti dont les travaux s'ouvrent aujourd'hui à la Coupole Mohamed-Boudiaf à Alger. Déboutés par deux fois en l'espace de deux jours, dans des référés devant le tribunal pour annulation de la réunion du comité central (CC), puis de l'autorisation délivrée par les services de la wilaya d'Alger pour la réunion du congrès, les adversaires d'Amar Saâdani, dont les contestations ont été coordonnées par Abdelkrim Abada, Salah Goudjil, ou encore Abderrahmane Belayat, réalisent sans nul doute que le parti leur échappe, sinon totalement, du moins en grande partie. Ils ont surtout dû comprendre que le très contesté secrétaire général du parti bénéficie de solides appuis, celui du président du parti, Abdelaziz Bouteflika, en premier chef. Et, au-delà de cet appui, c'est l'image du FLN éloigné des fondamentaux qui ont façonné son identité qui leur est renvoyée de manière brutale. Incontestablement, les rapports du FLN au système politique ont changé. Son rôle également. La crise qui agite le parti depuis aout 2013, sinon bien avant, n'a, à l'évidence, rien d'un conflit organique qui s'est enlisé faute des arbitrages d'autrefois. Sa nature est plus politique qu'organique. C'est ce qui explique, ne serait-ce qu'en partie, que la majorité, voire l'ensemble des figures historiques du FLN, se ligue contre la direction actuelle du parti, à sa tête Amar Saâdani. Le FLN de Saâdani incarne un parti qui tente de rompre avec ses ancrages traditionnels pour se mettre au service d'une oligarchie qui travaille à s'approprier l'entièreté de la décision et du pouvoir politique. Un positionnement qui ne pouvait que soulever l'opposition des caciques du parti, nostalgiques du temps où le centre de décision politique était ailleurs. Ces derniers ont accentué la charge contre le secrétaire général du parti dès le moment où il a dévoilé publiquement sa lettre de mission, à savoir prendre sur lui de démystifier, aux fins de l'affaiblir, le Département du renseignement et de la sécurité (DRS). Il n'en fallait pas plus pour que les caciques du FLN, qui ne sont dupes de rien, pour comprendre à quel enjeu répondait la bravade de Saâdani. Pour les historiques du FLN, l'estocade portée au DRS par le secrétaire général du parti ne pouvait qu'être inspirée par le clan présidentiel qui poursuit de renforcer son pouvoir de sorte à ne pas souffrir des arbitrages d'autres cercles décisionnels au moment d'organiser la succession. Il tient donc au clan présidentiel et aux oligarques qui le servent de s'assurer, le moment venu, du soutien d'un FLN qui s'alignera sans rechigner. Amar Saâdani répond au profil qui sied le mieux à un tel schéma de pérennisation du pouvoir oligarchique. Le secrétaire général du FLN ne nourrit pas une propre ambition à briguer la magistrature suprême. Ce qui n'est pas le cas d'un Abdelaziz Belkhadem, par exemple, à qui ses petites confidences auraient, paraît-il, valu sa grande infortune politique. D'aucuns se souviennent de quelle manière il a été débarqué du secrétariat général du parti au profit d'Amar Saâdani, et, par la suite, de son renvoi sans ménagement de la proximité du chef de l'Etat... avec, pire des châtiments, une condamnation à l'errance politique. S.A.I.