L'intensification des frappes soulève la réticence de certains chefs militaires américains qui redoutent qu'une multiplication des victimes civiles ne vienne renforcer la propagande de Daech. Il ne fait plus aucun doute, désormais, que la stratégie adoptée par les Etats-Unis et leurs alliés pour contrecarrer l'avancée de la mouvance terroriste d'Abou Bakr al-Baghdadi sur le terrain n'a pas donné les résultats escomptés. Pis, les dernières informations font état de la détérioration des rapports entre les Peshmergas kurdes et les milices chiites auxquelles a fait appel le gouvernement de Bagdad pour essayer de récupérer les villes occupées par Daech, notamment Ramadi. Des éléments des deux parties se sont sérieusement accrochés dans la province de Diyala. C'est dire que la coordination pour mener l'offensive contre Daech laisse vraiment à désirer un an après la prise de contrôle d'une bonne partie de l'Irak par ce groupe terroriste. Cela amène, d'ailleurs, les Etats-Unis et leurs alliés à revoir leur stratégie, basée jusque-là essentiellement sur des bombardements aériens des positions de Daech et un soutien en entraînement, conseil et matériel aux forces irakiennes, pour stopper son élan. En effet, depuis la mise en place en août 2014 de cette coalition internationale en Irak, les forces irakiennes peinent à regagner le terrain occupé par Daech, à l'exception de la ville de Tikrit, au nord de Bagdad. L'organisation d'Abou Bakr al-Baghdadi, qui a proclamé un califat à cheval sur les zones qu'elle contrôle en Irak et en Syrie, ne montre pas de signes d'affaiblissement, mais a réussi à occuper d'autres territoires, dont la superficie avoisinerait les 300 000 km2. Selon les analystes, les forces de Daech n'ont pas de problèmes d'argent, d'armements ou de recrutement, et ils se sont montrés très compétents dans l'exploitation des rivalités entre chiites et sunnites. Leur prise de la ville de Ramadi a représenté une défaite cinglante pour les forces irakiennes, mais également pour les Américains et leurs alliés. En dépit de cela, le président Barack Obama continue d'exclure que les troupes américaines participent aux combats au sol, même s'il a accepté d'autoriser le déploiement de 450 soldats américains supplémentaires en Irak pour accélérer la formation des troupes irakiennes engagées dans la lutte contre Daech. Pour Anthony Cordesman, un spécialiste du groupe de réflexion Centre for Strategic and International Studies, cette décision du patron de la Maison-Blanche est une politique de "rajouts insidieux". Pendant ce temps, certains responsables politiques ou experts, qui recommandent une plus grande implication militaire, préconisent que des forces spéciales soient envoyées près des combats pour conseiller les forces irakiennes et guider les frappes aériennes. Cela étant, les frappes aériennes pourraient être intensifiées, bien que les partisans de bombardements accrus dénoncent le fait que les avions de la coalition menée par Washington terminent 75% de leurs missions sans avoir largué de bombes. Mais l'intensification des frappes soulève la réticence de certains chefs militaires américains qui redoutent qu'une multiplication des victimes civiles ne vienne renforcer la propagande de Daech. Dans tout cela, le président Barack Obama ne veut pas faire la guerre à la place des Irakiens, comme le montre clairement sa déclaration en septembre dernier. "La puissance aérienne américaine peut permettre de faire la différence, mais nous ne pouvons pas faire pour les Irakiens ce qu'ils doivent faire par eux-mêmes, ni prendre la place de nos partenaires arabes pour sécuriser leur région." M. T.