À l'origine de ce conflit, une tentative d'assassinat qui aurait visé en novembre 2003 le prince héritier et actuel régent du royaume wahhabite, Abdallah Ibn Abdelaziz, un colonel des services du renseignement libyen actuellement en détention en Arabie Saoudite serait le commanditaire de l'opération. Se murant dans un silence depuis la révélation de ce “complot”, les autorités saoudiennes sortent enfin de leur mutisme en rappelant leur ambassadeur dans la capitale libyenne. Cette décision qualifiée de “grande surprise” par le régime de Kadhafi a été le détonateur d'un échange d'insultes entre les deux pays. Comme d'habitude, la presse constitue l'instrument idéal pour les dirigeants libyens et saoudiens pour rendre l'autre partie responsable de cette détérioration. Les journaux paraissant dans les deux pays s'en sont donnés à cœur joie en usant des plus vils qualificatifs envers les dirigeants du camp adverse. Kadhafi devient ainsi le “terroriste qu'il faut juger et dont il faut dénoncer les crimes”, dans les titres saoudiens qui n'oublient pas de rappeler qu'il a accédé au pouvoir par la grâce d'un coup d'Etat, à “l'instar du tyran de Bagdad Saddam Hussein” qu'il faut “aider le peuple libyen frappé d'adversité à s'en débarrasser”. À Tripoli, Benghazi et Syrte, les quotidiens tirent à boulets rouges sur la famille royale saoudienne la qualifiant d'“obscurantiste”. La crise est appelée à prendre d'autres proportions, surtout que les Al Saoud bénéficient du soutien de Washington dans cette affaire. En effet, le département d'Etat américain s'est déclaré guère satisfait des explications présentées par le régime de Mouammar Kadhafi, qui pourtant donnait l'impression ces derniers mois d'être rentré dans les rangs, si l'on se fie à ses déclarations et à sa décision de renoncer à l'armement nucléaire. Cette nouvelle crise avec l'Arabie Saoudite pourrait entamer son crédit auprès de la Maison-Blanche et de l'Occident d'une manière générale. Tout dépendra des développements de ce différend. En attendant, Riyad, qui a rappelé son ambassadeur en Libye jeudi dernier, n'a pas encore mis à exécution sa menace d'expulser l'ambassadeur de Kadhafi, alors que le délai qui lui a été imparti pour quitter Riyad a expiré dimanche passé. Cette accalmie est probablement due à la mission de médiation de la Ligue arabe dans l'espoir d'éviter le pire entre les deux pays. K. A.