Après l'avoir vouée aux gémonies, le président de la République exprime sa considération à l'opposition algérienne sans pour autant céder à ses revendications, dont l'organisation d'une transition et d'une élection présidentielle anticipée. Bouteflika suggère qu'il va aller jusqu'au bout de son mandat. Après le bâton, la carotte. Alors qu'il l'accusait, lors de la fête du 19 Mars dernier, dans un discours lu en son nom, de "pratiquer la politique de la terre brûlée", de "chercher à arriver au pouvoir, même en mettant l'Etat en ruine et en marchant sur les cadavres des enfants du peuple", voilà que le président Bouteflika, contre toute attente, découvre des vertus à l'opposition algérienne, celle-là même qu'il a ignorée durant son règne. Dans un message adressé hier au peuple algérien à l'occasion de la Fête de l'Indépendance, Abdelaziz Bouteflika a exprimé sa "considération" à l'opposition. "Il y a quelques années seulement, l'Algérie, son peuple et sa démocratie ont très chèrement payé le prix des discours populistes, de la démagogie et du défi à la loi, dit-il. Tirons donc les leçons de ces amères expériences pour nourrir notre pluralisme politique, associatif et syndical, de joutes nobles autour de programmes alternatifs. En effet, le peuple algérien a besoin de connaître les propositions alternatives prétendant améliorer son devenir, et il saura ensuite choisir souverainement lors des rendez-vous électoraux de la République. C'est là le message que j'adresse en ce jour de communion nationale à la classe politique du pays et au premier chef, aux acteurs de l'opposition à laquelle j'exprime ma considération." On ignore, dans ce contexte de crise et impasses politico-économiques s'il s'agit d'une tentative de nouer les fils d'un dialogue ou d'une manœuvre politicienne. "En effet, dans le respect de la déontologie démocratique, l'opposition est dans son rôle, tout comme sera dans son rôle la majorité qui a porté mon programme durant la campagne électorale et à laquelle il revient de le promouvoir aujourd'hui dans le cadre du débat démocratique, pour semer l'espoir et pour soutenir l'effort", ajoute-t-il. Mais s'il consent à l'opposition de jouer son rôle, il lui dénie cependant ses critiques acerbes sur son bilan, ou encore ses appels répétés à une élection présidentielle anticipée. "En fait, les libertés individuelles et collectives ont enregistré des avancées incontestables (...). Les champs politique et associatif comptent chacun des dizaines d'acteurs, s'exprimant et agissant tous sans contraintes, alors que l'espace médiatique connaît une diversité exceptionnelle (...)", affirme Bouteflika pour qui "l'Algérie n'est pas un champ de prédilection de la corruption". Tout en égrenant son bilan, le président Bouteflika, outre qu'il rappelle avoir été sollicité pour briguer un quatrième mandat, histoire de répondre à ses détracteurs, suggère à demi-mot qu'il n'est pas disposé à jeter l'éponge. "Vous avez été nombreux à m'interpeller pour que je poursuive la mission dont vous m'aviez déjà honoré trois fois. J'ai répondu à cet appel, acceptant ce sacrifice, malgré ma condition physique actuelle pour laquelle je remercie Dieu, pensant aussi au sacrifice suprême consenti par mes valeureux compagnons tombés au champ d'honneur, dans les rangs de l'Armée de libération nationale. En ce qui me concerne, je m'attellerai à accomplir ce devoir avec l'aide de Dieu, conformément au mandat que m'a confié la majorité de notre peuple", soutient-il. Son prochain chantier ? La révision de la Constitution qu'on disait abandonnée. "La consolidation de l'Etat de droit se poursuivra, au fil des réformes qui seront d'ailleurs confortées dans tous les domaines, par la révision de la Constitution, dont le projet est en phase de finalisation ultime", affirme Bouteflika. K.K.