L'exclusion de l'ancien général à la retraite, Khalifa Haftar, de l'actuel processus de discussions interlibyen serait à l'origine du blocage de ce dialogue parrainé par l'ONU. Derna, la ville côtière de l'Est libyen, a été la cible, dimanche soir, d'une nouvelle attaque suicide qui a fait neuf morts et des dizaines de blessés, alors que la rencontre d'hier à Genève, devant réunir l'émissaire onusien Bernardino Leon et les représentants de Fajr Libya, est reportée pour aujourd'hui. "Neuf personnes ont été tuées et des dizaines d'autres blessées dans l'explosion d'une voiture piégée dimanche soir à Derna", ont indiqué, hier, les médias libyens, citant des sources sécuritaires et médicales. L'attaque a été immédiatement revendiquée par la branche libyenne de l'Etat islamique (EI/Daech), précisant que le kamikaze, de nationalité soudanaise, se nommait Jaafar al-Soudani, selon un communiqué de cette organisation. "Le martyr Abou Jaafar al-Soudani a fait exploser sa voiture piégée dans un rassemblement d'apostats à l'est de Derna, faisant plusieurs morts et blessés", a indiqué le groupe terroriste qui tente de reconquérir Derna, après avoir été chassé fin juin par les milices locales. Daech avait promis qu'il allait revenir dans cette ville qu'il avait occupée durant des mois, profitant du départ en masse des miliciens pour combattre à Benghazi contre les troupes de l'opération al-Karama de l'ancien général à la retraite Khalifa Haftar, proclamant par la même occasion la création du nouveau califat en Libye. Outre l'attaque de Daech à Derna, des affrontements ont opposé pour la troisième journée consécutive des partisans du défunt guide libyen Mouammar Kadhafi aux miliciens pro-Fajr Libya, dans la ville du sud Sabha, faisant quatre morts au moins et d'importants dégâts matériels. Les partisans du dirigeant de l'ancien régime de Tripoli ont déjà manifesté, pour la première fois depuis quatre ans, dans les rues de Benghazi (Est), mais ils ont essuyé des tirs de la part d'hommes armés qui occupent cette ville où Daech tente de s'implanter. Au milieu de ce chaos sécuritaire, les Libyens n'avancent nullement sur le plan politique. La proposition par l'ONU d'un accord de paix n'a pas eu l'approbation du gouvernement parallèle de Tripoli, non reconnu par la communauté internationale. La réunion programmée pour hier à Genève a, d'ailleurs, été reportée pour aujourd'hui, en raison de frictions qui sont apparues au sein même du Conseil général national (CGN, Parlement de Tripoli), qui n'a toujours pas signé l'accord de paix de Skhirat (Maroc). Une partie des députés islamistes de Misrata, d'où est issu Fajr Libya, rejette toute nouvelle discussion avec Bernardino Leon, sans la prise en compte des remarques émises à l'envoyé spécial onusien, lors de la dernière entrevue à Alger, au début du mois d'août. Fajr Libya, la branche libyenne des Frères musulmans, inféodés entre autres à la Turquie de Reccep Teyyip Erdogan (islamo-confédérateur du Parti de la justice et du développement), fait des pieds et des mains pour écarter Khalifa Haftar du processus politique actuel. Accusé de travailler au profit des Etats-Unis, Khalifa Haftar s'est lancé dans une guerre sans merci contre les milices islamistes (Fajr Libya, Ansar al-Charia, Conseil des combattants de Derna) depuis mai 2014. En dépit des voix qui s'élèvent partout pour une solution politique à cette crise, l'option armée semble être privilégiée par les principaux acteurs libyens. L.M.