L'ancien "émir" de l'Armée islamique du salut (AIS), bras armé du FIS dissous, Madani Mezrag, a annoncé, jeudi, la création d'un parti politique. Il se montre assez confiant quant à l'aboutissement de son projet, alors que les lois, celle portant charte pour la paix et la réconciliation nationale tout comme celle relative aux partis politiques, ne lui confèrent pas le droit pour une telle entreprise. Me Merouane Azzi, président de la cellule pour l'application des dispositions de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, est formel : "Toutes les lois en vigueur interdisent à M. Mezrag d'exercer une activité politique légale." Il se réfère aux dispositions de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, ainsi qu'à la loi sur les partis dont, respectivement, les articles 26 et 5 qui stipulent clairement que l'activité politique est "interdite, et sous quelque forme que ce soit, à toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale". Pour ce magistrat, dont la mission a pris fin en juin dernier, conformément aux lois actuelles, Madani Mezrag est, de fait, interdit d'activer, encore moins de solliciter un agrément pour créer un parti politique. Mais la légalité ne semble pas poser problème à Mezrag qui a déjà tenu successivement une "université d'été" à Mostaganem, puis un "congrès" dans son ancien maquis terroriste à Jijel. Il avait même été reçu au siège de la présidence de la République par le directeur de cabinet de la Présidence, Ahmed Ouyahia, dans le cadre des consultations autour du projet de la révision constitutionnelle. L'ancien chef terroriste, ayant été amnistié dans le cadre de la Concorde civile, aspire, désormais, à déposer auprès du ministère de l'Intérieur une demande d'agrément de son parti appelé "Le Front de l'Algérie pour la réconciliation et le salut". Une demande que les autorités ne pourront, en aucun cas, satisfaire sans le changement de la législation en vigueur, estime Me Azzi. Un changement, précise-t-il, que seul le président de la République pourrait décider conformément à l'article 47 de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Cet article, rappelle-t-il, confère au Président, et à lui seul, la prérogative de prendre les mesures et les décisions qu'il voudrait. En d'autres termes, c'est au Président qu'il appartient de décider si des personnes amnistiées dans le cadre de cette même Charte peuvent ou non faire de la politique. Or, même avec l'intervention du chef de l'Etat, Madani Mezrag sera logiquement "rattrapé" par l'article 5 de la loi sur les partis qui stipule que "le droit de fonder un parti politique, de prendre part à sa fondation ou de faire partie de ses organes dirigeants est interdit pour toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale. Ce droit est également interdit à quiconque ayant participé à des actions terroristes, et qui refuse de reconnaître sa responsabilité pour sa participation dans la conception, la conduite et l'exécution d'une politique prônant la violence et la subversion contre la nation et les institutions de l'Etat". À moins donc de réviser la loi sur les partis politiques ou sinon de la violation de la loi en vigueur, Madani Mezrag ne pourrait exaucer son vœu de fonder un parti politique. F.A